Monsieur le Ministre,

Malgré une féminisation des cohortes de diplômé.e.s en droit et bien que 45,9% des avocat.e.s soient des femmes, ces dernières sont largement minoritaires parmi les avocat.e.s de plus de 40 ans ainsi qu’aux postes à responsabilité, et gagnent en moyenne la moitié du salaire touché par leurs confrères.

Dans l’ordre judiciaire : les statistiques de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes concordent avec celles du SPF Justice : si l’on peut se réjouir qu’un peu plus de la moitié des magistrats soient en fait des magistrates, comme j’ai pu le lire sur votre site internet[1], ces dernières demeurent minoritaires dans les degrés supérieurs de l’appareil judiciaire ainsi qu’aux postes de chefs de corps : l’assemblée générale d’AVOCATS.BE compte 3 femmes sur les 12 bâtonnier.e.s des barreaux francophones et germanophone de Belgique. Pour ce qui est du conseil d’administration, il ne compte qu’une seule femme sur 9 administrateurs et n’a jamais connu de femme à sa présidence.

Monsieur le Ministre, le constat est clair : le monde judiciaire demeure profondément inégalitaire.

Pouvez-vous m’indiquer ce qui est mis en place pour :

  • lutter contre le phénomène d’arrêt prématuré des carrière des femmes avocates et magistrates ?
  • garantir l’égalité salariale ?
  • assurer la parité à tous les niveaux (des professions judiciaires/du monde judiciaire/des institutions judiciaires) ?

Pour quand sont prévus les prochaines radiographies des barreaux ?

Je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour vos réponses à mes questions

[1] https://www.koengeens.be/fr/news/2018/01/16/les-femmes-magistrats-sont-desormais-majoritaires

Koen Geens, Ministre

Madame la présidente, madame Schlitz,

La magistrature se féminise depuis des années. Sur la base des chiffres 2018, je peux vous indiquer qu’au niveau de première instance, 56 % du nombre total de magistrats professionnels du siège et 57 % du ministère public concernent actuellement des femmes. Au niveau des cours, la moitié des conseillers sont des femmes. À la Cour de cassation, 30 % des conseillers le sont également.

Ce n’est dès lors qu’une question de temps pour que cette tendance se consolide dans la plus haute juridiction. Récemment, une femme a été nommée en tant que première présidente de la Cour de cassation, à savoir le plus haut magistrat de ce pays.

Les conditions de nomination sont évidemment objectives et égales pour tous. Les traitements sont aussi fixés légalement et ne font aucune distinction entre genres. Les Ordres OBFG et l’OVB et leurs barreaux fonctionnent de façon autonome par rapport au ministre de la Justice pour ce qui concerne la composition de ces organes. Je me base dès lors sur leurs informations. Pour les barreaux francophones et germanophone, on constate une augmentation continue depuis 2007 du pourcentage de femmes avocats qui dépasse, pour la première fois, les 50 %. Cette augmentation illustre une féminisation constante de la profession. L’OBFG ne possède pas d’informations concernant les différences salariales éventuelles.

La profession d’avocat étant une profession libérale, l’Ordre n’a aucune compétence pour imposer une quelconque règle en la matière.

En ce qui concerne la représentation des femmes au sein des instances, l’assemblée générale de l’OBFG a adopté cette année une modification de son règlement d’ordre d’intérieur prévoyant que, pour chaque poste vacant, les barreaux veilleraient à présenter dans la mesure du possible au moins deux candidats de sexe différent. L’Ordre des barreaux flamands et barreaux locaux évolue également vers une plus large présence des femmes au sein des organes et au niveau des positions clés. En 2015, 4 bâtonniers sur 10 étaient des femmes alors qu’en 2003, il n’y en avait pas une seule sur 14 bâtonniers.

L’OVB veille à une politique de non-discrimination non seulement dans le rapport hommes-femmes mais tend aussi dans la mesure des possibilités à assurer une représentativité de toute forme de différence. Madame Schlitz, prenez donc courage: l’avenir sera très beau!

Ma réplique

Monsieur le ministre, je vous remercie pour cette réponse. En réalité, ce n’est pas avec du courage que l’on parvient à l’égalité mais en prenant des mesures.

En effet, il y a une tendance à la féminisation. On le dit souvent: on peut faire dire ce que l’on veut aux chiffres. Si nous constatons une féminisation des cohortes qui sortent de l’université, on

observe qu’à 30 et 40 ans, le nombre de femmes occupant le métier d’avocat ou des places dans la magistrature décline. C’est d’autant plus visible plus on monte dans la hiérarchie du système judiciaire.

Il me semble important de ne pas nous voiler la face par rapport à ce phénomène et de le prendre à bras-le-corps. Si une femme a été désignée à la Cour de cassation c’est parce qu’aujourd’hui, on a instauré un quota. D’autres quotas devraient être instaurés à d’autres niveaux.

Une association, la Fem&L.A.W , composée de femmes juristes issues de différents horizons, oeuvre pour soutenir et proposer des solutions pour que les métiers d’avocat et de magistrat se féminisent. L’association a été invitée récemment par le conseil d’administration d’avocats.be qui se rend compte des problèmes de genre. Elle a formulé une série de recommandations dont j’ai fait une sélection, recommandations qui pourraient nous concerner:

  • proposer des conférences par et pour les juristes au sujet de l’égalité dans leur propre milieu professionnel;
  • produire et diffuser des documents relatifs aux chiffres et aux droits des femmes au travail de façon large, sous la forme d’une campagne, par exemple;
  • mener des études de fond permettant d’affiner les diagnostics trop restreints actuellement au vu du caractère multifonctionnel de la non- représentation des femmes dans le monde juridique.

Cela permettrait de compléter les informations dont nous disposons ici car, comme vous l’avez dit, nous ne disposons pas des chiffres relatifs à l’écart salarial, par exemple. Sans chiffres, nous ne pouvons correctement appréhender les problèmes.

L’association propose de formuler des propositions concrètes du type aménagement des horaires et des carrières, mise en place d’une garderie au sein du palais de justice pour mieux concilier vie professionnelle et vie de famille, toutes propositions permettant aux femmes de s’épanouir dans leur carrière tout au long de leur vie.

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