Cette question a été adressée à la Ministre de la Justice, Annelies Verlinden, lors de la commission Justice du 12 mars 2025. Le compte rendu complet est disponible ici.
Madame la Ministre,
Il me revient que des dossiers concernant des prévenus sans titre de séjour seraient cités devant les chambres néerlandophones du Tribunal correctionnel de Bruxelles, alors que ces personnes ont été auditionnées en français et n’ont pas demandé le changement de langue. Cette pratique, si elle est avérée, constitue une violation flagrante de la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire.
Etes-vous en mesure de confirmer que la recherche d’efficacité au sein du Parquet de Bruxelles ne s’appuie pas sur de telles pratiques, et ne se fait pas au détriment des garanties légales en matière d’emploi des langues, et des droits de la défense des justiciables?
Réponse de la Ministre Verlinden
Madame Schlitz, le procureur du Roi de Bruxelles a pris le 9 janvier 2025 une circulaire interne visant à régler l’emploi des langues dans la procédure pénale sur le territoire des communes de l’agglomération bruxelloise. Je peux vous assurer que cette circulaire est conforme à la loi sur l’emploi des langues.
Le régime actuel de la législation linguistique pour les prévenus de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles a été modifié par la loi du 19 juillet 2012 après la division de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles. C’était un texte de compromis.
Dans son arrêt n° 96/2014, la Cour constitutionnelle a examiné ce régime. Un certain nombre d’ajustements ont été apportés par les articles 177 et 178 de la loi du 25 avril 2014 accentuant l’unilinguisme institutionnel et facilitant le renvoi.
Depuis lors, la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire prévoit à l’article 16, premier paragraphe que dans les tribunaux correctionnels de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles, si le prévenu est domicilié dans l’agglomération bruxelloise, la langue de la procédure est le français ou le néerlandais, selon que le prévenu a fait usage à l’instruction ou, à défaut de celle-ci, à l’information, de l’une ou de l’autre de ces langues pour ses déclarations.
Dans tous les autres cas, il est fait usage du français ou du néerlandais selon les nécessités de la cause. Il ne peut en principe, dans ce cas de figure, être dérogé à cette règle que si une demande est faite en vertu de l’article 16, paragraphe 2, alinéas 1 à 3 de la loi du 15 juin 1935 pour transmettre l’affaire au tribunal correctionnel de Bruxelles de l’autre rôle linguistique.
Si l’inculpé ne comprend pas la langue dont il demande l’emploi dans la procédure, le fait est constaté au procès-verbal du magistrat instructeur ou par le plumitif de l’audience et la procédure aura lieu dans l’autre langue.
Ce n’est que lorsque le suspect ne parle ni français ni néerlandais que le parquet de Bruxelles apprécie, en fonction des besoins de la cause, la langue de la procédure. La loi permet au parquet le choix de la langue de la procédure. Dans cette hypothèse, la circulaire du parquet prévoit de contacter le magistrat de garde.
Le siège hérite des dossiers et chaque magistrat statue sur le fond et quant au respect de la procédure, y compris quant à l’emploi des langues.
Réplique de Sarah Schlitz :
Madame la ministre, je vous remercie pour ce rappel de la loi. Néanmoins, j’ai des témoignages de personnes qui ont été entendues en français et dont le dossier est poursuivi en néerlandais.
C’est donc un cas de violation de la législation d’après ce que j’entends. J’espère que des contacts seront pris avec Bruxelles pour s’assurer que cette pratique n’est pas de mise. Je compte sur vous.