Monsieur le président, madame la ministre, le lobby du tabac a sabré le champagne la semaine dernière. En effet, en abaissant les amendes sur la publicité illégale pour le tabac de 80 000 à 2 000 euros, vous avez invité le lobby du tabac à persévérer dans ses manœuvres de contournement de la législation. Or, chez nous, la cigarette continue à tuer quinze mille personnes chaque année.

 

En Belgique, nous étions précurseurs en matière de lutte contre le tabagisme. Aujourd’hui, les études prouvent que nous sommes à la traîne. Avec cette nouvelle mesure, on assiste à un recul dans cette lutte.

Par ailleurs, il est dramatique de constater que le tabac séduit toujours plus de jeunes. Une étude menée dans différents pays a prouvé que près de 20% des adolescents de quinze ans fument chaque jour.

Madame la ministre, j’ai lu dans la presse que vous affirmiez ne toucher ni à l’âge ni à l’interdiction de la cigarette dans certains lieux. Très bien, comme si la publicité était un élément annexe! Pourtant, la publicité n’est pas anodine. Diverses études démontrent que la publicité a des effets néfastes sur la santé, tant physique que mentale. Elle entraîne du stress, de l’obésité, de l’anorexie, de l’angoisse, et j’en passe.

On sait également que les jeunes sont plus sensibles à la publicité. Les publicitaires et le lobby du tabac le savent pertinemment. La stratégie des cigarettiers n’est pas de faire changer un consommateur de tabac de marque mais de convaincre de nouveaux fumeurs. Où vont-ils les chercher? Parmi les catégories les plus fragiles, les jeunes! Avec cette possibilité d’encore mieux contourner la législation, vous offrez sur un plateau d’argent au lobby du tabac l’occasion de séduire ces jeunes.

Madame la ministre, pourquoi avez-vous pris cette mesure? Comment comptez-vous déjouer les stratégies des multinationales du tabac, en particulier à l’égard du jeune public?

Réponse de Maggie De Block, ministre

Je suis fort surprise que cette mesure ait suscité tant d’attention.

Certains journaux – tout comme vous, madame Fonck – ont donné l’impression que j’opérais un recul dans la lutte contre le tabac.

En fait, c’est le contraire. Mon intention était de nous offrir davantage de possibilités de sanctionner les infractions aux règles en matière de publicité pour le tabac. Jusqu’il y a peu, les amendes étaient les mêmes pour tous, avec un seul tarif. Mes services n’étaient pas en mesure de faire la distinction entre, d’une part, un fabricant ou un grossiste en tabac et, d’autre part, un vendeur de journaux de quartier. Les amendes allaient de minimum 80 000 euros à maximum 800 000 euros, avec pour conséquence que seuls quelques pourcents de l’amende ont été réclamés ces dernières années, le reste étant suspendu par les tribunaux, car disproportionné.

Le service d’inspection du SPF Santé publique a attiré mon attention sur cette situation et a demandé une adaptation. Je devais élargir le dispositif des amendes. Seul le commerce de détail voit le montant de l’amende minimale diminué à 10 000 euros. En revanche, le montant maximum est maintenu à 800 000 euros. Pour tous les autres acteurs, l’industrie du tabac et les grossistes, les amendes sont inchangées.

Affirmer que je ménage les acteurs du tabac est totalement absurde. Demandez-leur ce qu’ils pensent de nos mesures et de l’introduction du paquet neutre! Grâce à cette adaptation, nous sommes en mesure de procéder à des rappels à l’ordre effectifs dans les commerces de détail et de lutter efficacement contre les infractions en matière de publicité pour le tabac.

Ma réplique :

Merci pour votre réponse, madame la ministre.

Je constate une fois de plus que la législation est complexe, et la mesure que vous venez de prendre ne la simplifie pas. Les lobbies des cigarettiers, malins comme ils sont, se servent de l’ambiguïté de la législation pour la contourner et utilisent cette complexité pour bénéficier de périodes transitoires retardant la suppression des dispositifs illégaux. On joue au chat et à la souris, et les inspecteurs n’ont pas assez de moyens pour faire appliquer la loi.

Madame la ministre, je vous demande de supprimer purement et simplement les dérogations à l’interdiction de publicité pour le tabac et de donner les moyens aux inspecteurs de faire leur travail.