Monsieur le Ministre,

Les femmes payent un lourd tribut à cette crise : augmentation des violences conjugales, métiers de première ligne plus exposés au virus et cible de discriminations et menaces, harcèlement de rue, difficile conciliation entre vie de famille et vie professionnelle, … Et pourtant, c’est elles qui sont les plus présentes dans les rangs de bénévoles qui apportent du soin et du réconfort aux autres, ou qui cousent les masques que notre gouvernement peine à se procurer.

Les mesures prises dans le cadre du déconfinement et du redéploiement d’après-crise devront tenir compte de cette réalité une bonne fois pour toute. La réponse sociétale devra être à la hauteur de ce que les femmes accomplissent chaque jour. Les femmes ne peuvent pas une nouvelle fois être laissées pour compte.

Éradiquer les violences sexistes devrait faire partie des objectifs de l’après-crise. Nous attendons que le gouvernement fédéral joue un rôle de leader dans cette lutte, avec un plan et des moyens ambitieux à la clé.

Monsieur le Ministre, vous participerez le 8 mai prochain à une conférence interministérielle sur les droits des femmes qui portera sur le la feuille de route COVID et le plan de déconfinement.

  • Quelle position allez-vous défendre lors de cette conférence ?
  • Le fédéral est-il prêt à endosser un rôle de leader à la matière, avec les moyens nécessaires à la clé ?

Merci, Monsieur le Ministre, pour vos réponses à mes questions.

Réponse du Ministre De Crem (Commission Intérieur du 05/05/2020) :

Le 8 mai il y a la Conférence interministérielle (CIM) consacrée aux droits des femmes. Dans le cadre des travaux préparatoires, un groupe de travail chargé de la question de la violence à l’égard des femmes en période de confinement, composé de représentants des 12 ministres membres de la CIM, a organisé deux réunions à distance, à savoir les 2 et 17 avril 2020. Je tiens à signaler qu’en tant que Ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, je ne suis membre de cette CIM.

Néanmoins, pour la deuxième réunion, organisée le 17 avril, un collaborateur de mon cabinet a participé à la réunion du groupe de travail afin de répondre aux questions ayant spécifiquement trait aux compétences de l’Intérieur et de la police.

Les mesures de lutte contre la pandémie de COVID 19 font en effet accroître le risque de violence intrafamiliale et les services de police sont donc particulièrement attentifs aux signaux allant dans ce sens.

Le groupe de travail prépare les mesures à prendre dans le cadre des quatre piliers de la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, à savoir : (1) la prévention, (2) la protection et le soutien, (3) les poursuites et (4) la politique intégrale.

En ce qui concerne les services de police, la lutte contre la violence intrafamiliale et conjugale reste une priorité. Ce point a été souligné dans la directive du 27 mars du Comité de Coordination GPI relative à la fonctionnalité de base « assistance aux victimes », au sein de laquelle une attention particulière a été accordée au thème de la violence intrafamiliale et conjugale.

Cette directive transparente, qui s’applique à l’ensemble du pays, fait référence au devoir de la police de protéger les victimes de violences conjugales.

Le Comité de Coordination a identifié comme fonctionnalité de base de la police intégrée, l’attention permanente à accorder à la prise en charge de victimes.

Chaque service de police doit assurer une assistance aux victimes selon les modalités définies dans l’arrêté royal du 17 septembre 2001 déterminant les normes d’organisation et de fonctionnement de la police locale visant à assurer un service minimum équivalent à la population, et dans la circulaire ministérielle PLP10 concernant les normes d’organisation et de fonctionnement de la police locale visant à assurer un service minimum équivalent à la population. Il appartient aux partenaires locaux eux-mêmes d’établir des accords à ce sujet et de les intégrer dans le plan zonal de sécurité sous forme de normes de qualité.

Sur base de la circulaire GPI 58, la police est, plus que jamais, tenue d’apporter une assistance aux victimes. L’aide aux victimes est de préférence fournie par le service de police qui se rend sur place, indépendamment du cadre organisationnel de ce dernier.

Compte tenu des circonstances particulières, il peut être préférable pour certaines victimes d’être contactées par téléphone et/ou par d’autres moyens numériques.

Les formes particulières de victimisation et/ou de plaintes urgentes et/ou graves présentant un risque pour l’intégrité physique des personnes (mineurs, violence intrafamiliale, etc.) doivent d’abord être immédiatement traitées par les services de première ligne et, uniquement dans la mesure où ils le jugent nécessaire, avec l’aide du personnel de police formé dans le domaine de l’assistance aux victimes.

Les mesures mises en place doivent également tenir compte des besoins spécifiques de certains groupes de la population (les personnes/groupes vulnérables et défavorisés, les jeunes et les personnes âgées, les personnes n’ayant pas accès aux informations numériques, les victimes de violence intrafamiliale et de situations d’éducation préoccupantes, etc.).

Du point de vue de la santé psychosociale et dans le cadre de la mission de la police intégrée, les signaux alarmants émanant de la société et des acteurs de terrain (des magistrats de la jeunesse, des établissements accueillant des jeunes ou des personnes âgées et des institutions de lutte contre la pauvreté) ne peuvent pas être négligés.

Les mesures supplémentaires au niveau de chacun des 4 piliers, ont été préparées dans le cadre des 2 réunions du groupe de travail. La décision définitive au sujet de celles-ci ne sera prise que lors de la CIM du 8 mai. Vous comprendrez que je ne peux pas anticiper sur les conclusions du débat, d’autant plus que je ne participerai pas à cette CIM.

En ce qui concerne les services de police, un courrier a été adressé aux centrales d’urgence (CIC) pour attirer, une fois de plus, l’attention sur la situation de risque supplémentaire en matière de violence domestique ou intrafamiliale.