Monsieur le Ministre,

La semaine dernière, lors des auditions sur les mesures de contrôle renforcées des bénéficiaires de la Grapa, il est ressorti que 68% de ces bénéficiaires sont des femmes. Soit 70.000.

En effet, les montants de la pension dépendant des carrières professionnelles passées, il est assez logique de constater que la Grapa pallie particulièrement aux insuffisances du système de pensions envers les femmes. La Grapa permet ainsi très partiellement de compenser les effets de la division genrée du travail.

J’en profite pour rappeler que les règles de calcul actuelles de la pension entraînent que les femmes, en moyenne, ont une pension bien inférieure à celle des hommes (l’écart est ainsi évalué à 28%). Les seuils d’accès et les montants de la Grapa ne permettent ainsi pas, aujourd’hui, d’éviter la vie dans la pauvreté.

Avec les mesures renforcées de contrôle des bénéficiaires que vous avez instaurées, Les femmes âgées sont donc davantage que les hommes âgés sujettes à des restrictions importantes de leur droit à circuler.

Monsieur le Ministre :

  • Un gendermainstreaming a-t-il été réalisé avant d’introduire ces nouveaux contrôles ?
  • Plus globalement, êtes-vous ouvert à l’idée de réaliser un gendermainstreaming plus global sur la situation de précarité des femmes âgées ?
  • Suite aux constats posés par les experts la semaine dernière, quelles mesures correctrices comptez-vous introduire afin de réduire l’écart de revenus entre les femmes et les hommes dans notre pays ?
  • Vu le caractère liberticide et disproportionné des mesures de contrôle introduites, telles que dénoncées par les experts, soutenez-vous l’idée d’améliorer et augmenter les possibilités de voyager, rendre visite à leur famille à l’étranger, circuler librement… des personnes âgées et parmi elles, des femmes? Et donc en partant des besoins et réalités des femmes âgées ?

Je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour vos réponses à mes questions.

 

Réponse du Ministre Bacquelaine (Commission Pensions du 11/03/2020) :

Il est curieux de procéder à ce débat maintenant, avant les résultats de la procédure d’évaluation. D’abord, la GRAPA n’est pas une pension mais une allocation sociale dont peut bénéficier une personne de 65 ans ou plus n’ayant jamais travaillé en Belgique et donc jamais cotisé. Ses bénéficiaires doivent résider en Belgique. La nouvelle procédure de contrôle ne change rien à cette obligation qui s’impose à tous les bénéficiaires d’une allocation d’aide sociale.

L’ancienne procédure contraignait les bénéficiaires à se rendre à la commune pour compléter un certificat de résidence et aboutissait souvent à des suspensions injustifiées. Tout le monde devait se présenter à la commune mais il avait été admis de ne pas imposer de contrôle aux 80 ans et plus. Dans la nouvelle procédure, la majorité des personnes ne doivent plus se présenter à la commune. Dès lors, le motif pour lequel le contrôle avait été supprimé au-delà des 80 ans n’existe plus.

Selon l’administrateur général, les facteurs n’agissent pas en tant que contrôleurs. Le SFP ne délègue pas ses compétences de contrôle à bpost. Je soutiens la nouvelle procédure, plus efficace pour lutter contre les fraudes et moins contraignante pour les bénéficiaires de la GRAPA. Les premiers chiffres démontrent que 78% des bénéficiaires contrôlés n’ont pas dû aller à la commune, grâce à la nouvelle procédure. Le certificat de résidence leur a été remis par le facteur. Si le bénéficiaire de la GRAPA ne renvoie pas le certificat de résidence dans les cinq jours ouvrables après le dépôt dans la boîte aux lettres, le SFP lui notifiera la suspension de sa GRAPA en l’invitant à produire les preuves de sa présence sur le territoire belge. Les suspensions justifiées sont les suspensions pour lesquelles les preuves nécessaires n’ont pas été apportées par l’intéressé.

Le SFP a averti tous les hôpitaux, en 2019, de la nouvelle procédure, pour qu’ils informent à leur tour les patients ou leurs proches. Si le bénéficiaire oublie d’informer le SFP de son séjour dans un hôpital ou dans un centre de revalidation, il pourra en apporter les preuves par après, comme c’était déjà le cas. En cas de perte des documents, le SFP accepte des copies. En cas de contestation de la suspension de la GRAPA, le bénéficiaire peut s’adresser au SFP ou au médiateur pensions ou introduire un recours auprès du tribunal.

Quarante-deux plaintes ont été introduites au SFP, huit auprès du médiateur pensions. Six dossiers sont examinés par un tribunal et portent essentiellement sur le renvoi tardif du certificat de résidence ou sur le dépassement du délai de 29 jours à l’étranger, qui n’ont rien à voir avec la nouvelle procédure. Le représentant de bpost, lors de son audition le 3 mars, a précisé que le temps moyen dont dispose un facteur pour déposer le pli est de 80 secondes. Les chiffres seront disponibles le 25 mars, quand l’évaluation de la nouvelle procédure sera terminée. Cette évaluation sera présentée lors du comité de gestion du 23 mars. Le groupe de travail chargé de l’évaluation prendra en compte les plaintes, remarques, questions et les chiffres objectifs par rapport aux six premiers cycles de contrôle. On évaluera le coût global de la procédure et l’impact des suspensions, sans porter sur le coût de l’assistance par les CPAS. La procédure de contestation de la suspension de la Grapa n’a pas changé. L’assistance des CPAS n’a pas non plus changé.

La nouvelle version de l’article 42 de l’arrêté royal du 23 mai 2001 stipule que le bénéficiaire de la GRAPA ne doit plus informer la commune, mais bien le SFP de son retour en Belgique après un séjour à l’étranger de plus de 29 jours. Le SFP active alors immédiatement une procédure de contrôle.

Quant au gender mainstreaming, le SFP n’a pas fait d’analyse spécifique avant la nouvelle procédure, qui traite tous les bénéficiaires, indépendamment de leur genre, dans le respect de l’égalité de traitement. Pour le montant des pensions des femmes, je renvoie à la réponse à la question de M.DeVuyst. Le SFP s’oppose à la consultation du contrat avec bpost, vu la confidentialité des conventions commerciales. Un draft a déjà été communiqué au Parlement.

Il y a 106 489 bénéficiaires de la GRAPA, dont 36 677 hommes et 69 812 femmes. En ce qui concerne le nombre d’années de carrière prises en compte pour la pension, le SFP indique que 28,38% des bénéficiaires n’en ont aucune ; 12,74% entre un et neuf ans ; 12,57% entre 10 et 19ans ; 14,13% entre 20 et 29 ans et 32,18% plus de trente ans. Pour les bénéficiaires qui perçoivent une pension de survie, le SFP indique qu’aucune année de carrière n’est comptée pour 91,49%. Pour 1,5%, le nombre d’années de carrière se situe entre un et neuf ans ; pour 1,62%, entre 10 et 19 ans ; pour 2,03%, entre 20et 29 ans et pour 3,34%, plus de trente ans. 29,46% des bénéficiaires ont plus de 80 ans.

Je ne dispose pas de la répartition hommes-femmes pour le montant.