Question orale posée à la Ministre Verlinden le 21 octobre 2025. Lien vers le compte rendu complet de la Comission
Ma question :
Madame la ministre, le 10 septembre dernier, la RTBF a diffusé un nouveau reportage sur l’état de délabrement des bâtiments de la justice: des immeubles qui s’effondrent, des avocats et des juges à bout de souffle qui travaillent dans des conditions exécrables, des retards de dossiers de plusieurs années. Bref, le constat est accablant, et je pense que vous le connaissez.
Vous avez d’ailleurs déclaré que la situation est indigne d’un État de droit. Nous vous rejoignons évidemment dans votre constat. La justice manque de moyens urgents pour faire son travail et il est primordial d’y investir. Ce n’est même plus juste une question de rémunération et de valorisation du travail de magistrats, mais une question de bien-être civil et sociétal, d’accès à la justice mais aussi d’État de droit, parce que quand la justice souffre, c’est toute la Nation qui y perd.
Dans ce contexte, madame la ministre, comment le gouvernement compte-t-il trouver des solutions à cette catastrophe que l’État fédéral a lui-même créée avec 40 ans de sous-investissement dans la justice? Quel montant le gouvernement investira-t-il dans le refinancement de la justice et ses bâtiments? Enfin, qu’en est-il de l’enquête que vous aviez annoncée dans l’émission sur le non-usage du nouveau palais de justice à Namur pendant une période de 18 mois?
Réponse de la ministre :
Depuis mon entrée en fonction comme ministre de la Justice, j’ai effectivement pu constater l’état des palais de justice dans notre pays. J’ai déjà attiré à plusieurs reprises l’attention de ce Parlement sur le sous-financement structurel et sur les besoins de longue date dans ce domaine.
La situation actuelle est en effet indigne d’un État de droit et, depuis mon entrée en fonction, j’ai demandé à mes services de dresser un état des lieux clair de la situation. Ce travail réalisé avec la Régie des Bâtiments est en cours. Comme vous le savez, mes services sont en concertation étroite avec la Régie afin d’analyser les besoins et de formuler des propositions ciblées pour y répondre. Je suis également en contact permanent et de suivi avec ma collègue Vanessa Matz, ministre chargée de la Gestion immobilière de l’État, avec qui j’entretiens une excellente collaboration.
Le plan d’impulsion que j’ai élaboré avant l’été en concertation avec les représentants de l’Ordre judiciaire aborde notamment la problématique du parc immobilier. Des budgets ont été alloués à partir de la provision interdépartementale Sécurité afin d’améliorer l’entretien et l’état des bâtiments ainsi que la sécurité du personnel et des visiteurs, notamment par le déploiement de nouveaux portiques de contrôle d’accès. Ces efforts ne suffiront cependant pas et des investissements supplémentaires restent nécessaires.
Collègue Schlitz, s’agissant du palais de justice de Namur, le SPF Justice a reçu le bâtiment de la Régie des Bâtiments en avril 2024 et a ensuite lancé la phase finale d’aménagement pour le mobilier, les archives, le réseau informatique, la téléphonie ou encore le déménagement. Ces opérations sont indispensables au bon fonctionnement du palais et expliquent le délai préalable à l’emménagement effectif. Le déménagement, mené de mai à août 2025, s’inscrit dans un calendrier normal d’environ 12 à 18 mois et l’Ordre judiciaire en a été tenu informé en toute transparence. Néanmoins, nous continuons chaque jour à améliorer les processus et à accroître l’efficacité.
Chers collègues, l’accord de gouvernement prévoit que le parc immobilier sera réduit et qu’une attention particulière sera portée à l’accessibilité des salles d’audience. Il souligne également l’importance de la proximité de la justice et précise qu’en tout état de cause, le produit de la rationalisation du nombre de bâtiments doit être réinvesti dans le reste du parc immobilier de la Justice. Des moyens supplémentaires seront toutefois indispensables si nous voulons disposer de bâtiments de justice sûrs, accessibles et dignes, à la hauteur de notre État de droit et de notre société.
Dans le cadre de la confection du budget, une attention particulière sera accordée à cette question. Je souhaite donc une fois encore lancer ici un appel à toutes et à tous afin que dans l’intérêt des justiciables, de l’Ordre judiciaire et de la société de manière générale, des efforts soient poursuivis de notre responsabilité pour répondre à ces besoins et dégager les moyens indispensables.
Ma réplique :
Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse volontariste. Il s’agit d’une cause qui rassemble, de députés issus de l’opposition et de la majorité se mobilisant sur cet enjeu avec sincérité. Je ne peux qu’espérer que les débats budgétaires en cours aboutiront à une fin heureuse pour le financement de la justice. C’est absolument indispensable. Il ne serait par contre pas souhaitable que les budgets alloués à la justice soient puisés dans les budgets de la sécurité sociale.
L’investissement dans les services publics et le fait de pouvoir utiliser de l’argent public pour l’État de droit, la qualité des services rendus au citoyen et le maintien de la démocratie sont des choses que nous devons toutes et tous défendre avec ferveur. J’espère que c’est cet équilibre et cette fin heureuse qui transparaîtront dans quelques heures ou quelques jours lors de l’aboutissement du budget fédéral.