Question orale posée à Vanessa Matz, Ministre de la Régie des Bâtiments, le 23 septembre. Le compte rendu complet se trouve ici.

Madame la Ministre,

Le 29 mai 2025, un incendie survenu à la prison de Lantin a amené à la mort d’un pompier ainsi que plusieurs blessés. Je vous avais interrogée sur le sujet et vous m’aviez dit qu’une enquête était en cours tout en renvoyant la majorité de mes questions à vos collègues les Ministres de l’Intérieur et de la Justice. Ceux-ci n’ont malheureusement pas été beaucoup plus utile et se sont renvoyer la balle à l’une et à l’autre.

Je vous avais dès lors fait savoir qu’on reviendrait sur ce dossier à la rentrée. Aujourd’hui, on est à la rentrée et ça fait presque 4 mois que Maxime Goessens nous a quittés. Et depuis; plus aucune nouvelle information n’a été communiquée sur l’évolution de ce dossier.

Vous nous aviez aussi communiqué lors de mon interpellation que vous alliez commander un cadastre de tout les bâtiments de l’État afin que des tragédies comme celle ayant entrainé la mort de Maxime Goessens ne se répètent jamais. Mais depuis, pas de nouvelles.

Je vous pose dès lors ces questions :

Quels développements pouvez-vous nous apporter quant aux études sur la stabilité de la prison suite à l’incendie ?
La Régie va t-elle réaliser un audit technique des bâtiments afin de enfin connaître leurs conformités face aux normes réglementaires ?
Quand va t-on pouvoir enfin voir ce cadastre des bâtiments comme vous nous l’aviez annoncé lors de votre entrée en fonction ?

Je vous remercie.

Réponse de la Ministre Matz :

Madame Schlitz et monsieur Daerden, je vous remercie pour vos questions.

Vous devez savoir que, dans les premiers jours qui ont suivi l’incendie du 29 mai à la prison de Lantin, une évaluation des dégâts structurels a été réalisée par un bureau d’études extérieur ainsi que par le service Stabilité de la Régie des Bâtiments. L’analyse a conclu que la stabilité de l’édifice n’était pas menacée. Des mesures de précaution ont été prises, notamment l’allègement du plancher au-dessus des travées qui avaient été touchées. Une procédure d’urgence a été enclenchée pour dégager et remettre en état l’étage ravagé par l’incendie. Toutefois, la zone sinistrée ayant été mise sous scellés, la Régie n’a pu intervenir qu’à partir de la mi-juillet. Les équipes de chantier sont présentes chaque jour et travaillent sans relâche à la remise en état du bloc concerné. À ce stade, il est difficile de communiquer un calendrier précis. L’objectif reste de minimiser la période d’inutilisation des fonctions de ce bloc.

L’enquête sur l’incendie de Lantin est toujours en cours et permettra de déterminer si des aspects de la gestion préventive et résiliente de l’infrastructure sont en cause. Selon les premières analyses, le système de détection incendie et la couverture par caméra ont permis d’identifier l’incendie dès ses premiers instants. Le compartimentage a limité la propagation du feu à la buanderie, démontrant l’efficacité des mesures existantes.

Pour la prison de Huy, bien que celle-ci soit vétuste – et je ne vais pas changer mon discours, monsieur Daerden, au motif que je me trouve non de l’autre côté puisque je suppose que nous poursuivons le même objectif en ce qui concerne, en tout cas, les prisons –, différents travaux de mise en conformité sont en cours ou prévus, notamment pour la détection incendie, l’éclairage de secours, l’installation du gaz et les tableaux électriques, pour un montant total de plus de 630 000 euros, TVA comprise. Des travaux de compartimentage ont également été engagés pour un coût de 285 000 euros, TVA comprise.

La rénovation complète est prévue dans le cadre du plan pluriannuel d’investissement de la Régie des Bâtiments, qui a été validé en mai 2024 et qui devra évidemment l’être à nouveau au cours du conclave qui se tiendra dans la quinzaine. Toutefois, le plan d’action structurel global de lutte contre la surpopulation, approuvé en juillet dernier, prévoit la rénovation de la prison de Huy et l’augmentation de sa capacité à 96 détenus, tout en examinant l’alternative d’une nouvelle construction avec une capacité supérieure. Ce projet sera repris dans le Masterplan 4 encore à établir.

Je tiens à souligner l’engagement des équipes sur le terrain et la priorité donnée à la sécurité des détenus, du personnel et des intervenants extérieurs.

Je vous remercie.

Ma réplique :

Merci, madame la ministre, pour vos réponses.

Aujourd’hui, on voit à quel point la dérive du système carcéral a des impacts sur des vies. On pense évidemment à Maxime et à ses collègues qui ont été blessés, à ses collègues qui, aujourd’hui, sont encore sous le choc du décès et de l’accident survenu à Lantin.

Face à cela, ces travailleurs qui, chaque jour, se lèvent pour aller dans les prisons doivent y aller avec la peur au ventre. Parce qu’en plus de travailler dans des conditions délétères, dans des climats extrêmement tendus, dans des conditions matérielles qui ne sont pas à la hauteur des missions qui leur sont confiées, ils savent désormais qu’il peut y avoir des morts dans l’exercice de leurs fonctions.

Aujourd’hui, ce système carcéral est totalement à bout de souffle. On voit la détresse des détenus, des familles, des travailleurs. On voit aussi les condamnations dont la Belgique fait l’objet au niveau international. On ne peut plus continuer comme ça.

Pourtant, ce que j’entends dans la bouche d’autres ministres – pas dans la vôtre –, c’est une fuite en avant. On veut encore augmenter les peines, on veut encore augmenter le réseau de places de prison, sans qu’il y ait le moindre recul sur les taux de récidive. Sommes-nous vraiment plus en sécurité quand davantage de personnes sont en prison et plus longtemps, sachant qu’il n’y a pas de formations, ou très peu et très peu qualitatives, ni de perspectives pour l’après développées en prison ?

Je pense que tout le système est à revoir. Au-delà de ce qui s’est passé à la prison de Lantin, je pense que cet événement doit servir de moment de rupture avec cette époque où l’on laissait à l’abandon les travailleurs, les détenus et les familles des détenus, et doit permettre d’entrer dans une ère où l’on prend de la distance par rapport à la prison.

Malheureusement, ce n’est pas encore le cas. Mais je pense que c’est indispensable qu’une voix dans le gouvernement puisse porter ce discours. Je compte sur vous pour le faire.

Je vous remercie.