Question posée au Ministre Vandenbroucke le 8 juillet 2025. Le compte-rendu intégral est à retrouver ici.
Monsieur le Ministre,
Les dernières données disponibles révèlent une hausse préoccupante de 13 % des cas de VIH en 2024 par rapport à 2022. Il s’agit de la troisième année consécutive de progression, et cette tendance concerne l’ensemble des groupes de population : les personnes hétérosexuelles représentent environ 49 % des nouveaux diagnostics, tandis que les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes en constituent 45 %.
Dans ce contexte, il est crucial de renforcer les outils de prévention disponibles. Or, la prophylaxie pré-exposition (PrEP), pourtant reconnue comme très efficace, demeure difficilement accessible dans notre pays. Actuellement, seul un médecin rattaché à un Centre de Référence VIH peut prescrire la PrEP dans le cadre d’un remboursement, après une évaluation annuelle. En dehors de ce circuit, la PrEP peut uniquement être obtenue via l’aide médicale urgente ou certains centres Croix-Rouge/Fedasil pour les personnes sans droit au séjour ou en situation précaire.
Face à ces obstacles, certaines personnes tentent de se procurer la PrEP en ligne, malgré l’interdiction en Belgique, ou via des réseaux informels (« PrEP sauvage »), sans aucune garantie quant à la qualité, la conservation ou la date de péremption des médicaments. Ce recours expose à des risques sanitaires graves, notamment la prise de PrEP en présence d’une infection VIH non diagnostiquée, pouvant entraîner des résistances aux traitements antirétroviraux ultérieurs.
Monsieur le Ministre,
- En janvier, vous répondiez ceci à une de mes questions “Cet outil de prévention étant assez récent, il faut réfléchir à la diversification de la délivrance de la PrEP.” Quelle est la stratégie de diversification choisie? Envisagez-vous d’autoriser les médecins généralistes à prescrire la PrEP dans des conditions encadrées, afin d’en élargir l’accessibilité et de mieux prévenir les nouvelles infections ?
- Quelles mesures concrètes entendez-vous prendre pour garantir un accès plus large, simple et sécurisé à la PrEP, y compris pour les publics vulnérables ?
- Plus largement, quelles actions prévoyez-vous pour freiner cette progression continue du VIH en Belgique ? Où en est la mise en œuvre du plan national VIH 2020-2026?
Je vous remercie.
Réponse du Ministre :
Depuis le 1er mai 2023, les spécialités concernées par la PrEP sont remboursées si elles ont été prescrites par un médecin lié à un centre de référence VIH, y compris lorsqu’il s’agit d’un médecin généraliste. La prescription ne doit donc plus émaner exclusivement d’un médecin spécialiste. Les médecins généralistes ou spécialistes doivent cependant être attachés à un centre de référence VIH et disposer d’une expérience suffisante dans le suivi des patients sous PrEP, comme défini dans la Convention de l’INAMI.
De plus, un assouplissement a également été apporté aux consultations de suivi requises dans les centres de référence pour le VIH. En effet, ces centres ont constaté un problème logistique important pour assurer les consultations de suivi trimestrielles, ce qui a entraîné la mise en place de listes d’attente et une prise en charge effective d’un nombre de patients sous PrEP inférieur à celui qui serait admissible sur base clinique. Concrètement, l’assouplissement a consisté en une adaptation concernant les visites de suivi qui peuvent depuis lors avoir lieu chez les médecins généralistes.
Ainsi, une implication partielle du médecin généraliste a été rendue possible pour les patients qui le souhaitent, toujours en concertation avec les centres de référence VIH à condition qu’une coordination efficace soit assurée entre ces centres et les médecins généralistes, afin que le contrôle et le suivi du patient restent bien encadrés par les centres de référence.
En ce qui concerne la question relative à l’accessibilité de la PrEP aux publics vulnérables, depuis le 1er avril 2024, la PrEP est également accessible aux travailleurs du sexe non assurés via une convention conclue avec les centres médico-sociaux pour les travailleurs du sexe, qui ont des accords de coopération avec les centres de référence VIH.
La question suivante est de savoir si nous devons autoriser tous les médecins généralistes, et donc également ceux qui ne sont pas liés à un centre VIH, à prescrire un traitement PrEP. Les avis des experts divergent car il peut arriver qu’ils ne possèdent pas les connaissances requises. L’accord de gouvernement prévoit néanmoins que nous examinions cette possibilité ce qui est en cours. Plus généralement, l’accord de gouvernement stipule que, en collaboration avec les entités fédérées, nous devons étudier comment rendre la PrEP plus accessible aux groupes vulnérables et poursuivre la mise en œuvre du plan VIH.
C’est pourquoi, la semaine dernière, le groupe de travail interfédéral Prévention (GTI Prévention) s’est réuni pour aborder la question du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles, dans une approche interfédérale, en présence d’une représentante du comité de suivi du plan VIH.
La discussion portait sur les actions prioritaires à mettre en œuvre d’ici fin 2026. Dans une vision de proximité et d’accessibilité, les actions retenues visent à rapprocher la prévention et le dépistage des populations touchées par le VIH et à garantir une approche sans stigmatisation, non discriminatoire et sensible à la diversité. La faisabilité, la mise en œuvre potentielle et les modalités d’exécution les plus appropriées de ces actions doivent encore faire l’objet de discussions approfondies avec les autorités sanitaires nationales et régionales, qui ont toutes confirmé leur motivation en la matière, chacune dans son domaine de compétences.
Ma réplique :
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour les différentes informations. À travers la réponse que vous nous avez apportée, nous voyons une volonté d’avancer vers une meilleure accessibilité de la PrEP. Toutefois, les éléments restent encore peu précis. Je crois que vous pouvez me rejoindre sur ce constat.
Pourtant, le temps presse. Depuis plusieurs mois, nous observons une augmentation des cas de VIH. Il faut donc prendre des mesures rapides pour faire en sorte que la PrEP, qui demeure l’un des meilleurs moyens de s’en prémunir, soit davantage accessible.
Il me semble que des actions assez simples peuvent être mises en place pour y parvenir.
Il s’agit soit d’intégrer la formation autour de ce dispositif dans la formation de base des médecins généralistes ou même des médecins tout court, ce qui serait une bonne chose, soit d’avoir la possibilité pour les médecins généralistes de se former à ce traitement. Je ne pense pas que cela demanderait non plus un investissement en temps et en argent démesuré pour pouvoir justement augmenter la démocratisation de ce traitement qui est vraiment fondamental pour faire face à l’augmentation de l’épidémie que nous connaissons aujourd’hui.