Question parlementaire posée à la Ministre Van Bossuyt en commission Affaires Sociales le mardi 1er juillet 2025

Madame la Ministre,

Madame la Ministre,

La réforme de l’assurance chômage du gouvernement Arizona prévoit l’exclusion de demandeurs d’emploi après un maximum de deux ans. Cela équivaudrait à plus de 180 000 personnes exclues des allocations de chômage. Or on sait déjà que tout le monde ne retrouvera pas un emploi dans ce délai, tout simplement parce que l’offre d’emplois n’est pas suffisante et que l’accompagnement reste largement insuffisant pour les personnes les plus éloignées du marché du travail, qu’il s’agisse de mamans solos, de personnes âgées ou de personnes d’origine non belge, qui sont encore aujourd’hui largement exclues et discriminées sur le marché de l’emploi. Votre collègue le ministre Clarinval nous répète régulièrement qu’au moins un tiers des personnes exclues vont se tourner vers les CPAS. Certains CPAS estiment même que ce pourcentage pourrait monter jusqu’à 50 %, au vu des caractéristiques socioéconomiques de leur population. Cette mesure aura donc un impact majeur sur leur fonctionnement, en particulier en termes de charge administrative, d’accompagnement des personnes et de pression budgétaire.

Madame la ministre, avez-vous à ce stade réalisé une estimation précise des conséquences financières pour les communes et les CPAS concernés? Comment votre gouvernement entend-il soutenir ces CPAS afin qu’ils puissent faire face à l’arrivée de bénéficiaires et relever un défi que, jusqu’ici, le Forem n’est pas parvenu à relever? Aujourd’hui, votre gouvernement demande aux CPAS de faire le travail que le Forem n’est pas parvenu à réaliser. Comment voyez-vous les choses sur le terrain? Certaines missions vont-elles être en réalité allouées au Forem ou aux organismes comme Actiris pour soutenir les CPAS?

Par ailleurs, votre gouvernement a annoncé le déblocage de 234 millions d’euros pour accompagner cette réforme. Sur quelle base ce montant a-t-il été calculé? Quels indicateurs ou quelles projections ont guidé cette décision? Comment ces moyens seront-ils répartis entre les CPAS? Quelle sera la clé de répartition? En d’autres termes, à combien un CPAS comme celui d’Anvers ou celui de Huy peut-il concrètement s’attendre, en termes de montant? Je vous remercie pour les réponses que vous pourrez apporter, parce qu’aujourd’hui, le terrain est très inquiet concernant ce qui en train de se produire et n’a à ce stade pas suffisamment d’informations pour pouvoir s’organiser correctement en vue de la mise en place de cette réforme.

Réponse de la Ministre : 

Tout d’abord, je tiens à souligner que je comprends qu’il y ait encore de nombreuses questions et de nombreuses inquiétudes. C’est une modification avec un impact considérable, c’est une réforme nécessaire mais qui entraîne une série de conséquences. Je comprends donc les inquiétudes. Tout d’abord, en ce qui concerne le budget prévu pour les CPAS j’essaye d’avoir plus de clarté au plus vite sur le montant et la clef de répartition pour les CPAS. J’espère avoir ces informations avant l’été afin que les CPAS et les administrations locales aient le temps pour se préparer, pendant l’été on crée souvent les budgets pour l’année qui suit donc il est important que les administrations locales savent à quels défis ils seront confrontés et de quel budget ils disposent. Il faut compenser les CPAS pour la charge de travail supplémentaire, initialement un budget était prévu à partir de l’année 2027, c’est inscrit dans l’accord du gouvernement. Au mois de juin nous avons atteint un accord pour prévoir un budget à partir de 2026. Éventuellement on veut envisager une intervention pour l’année 2025. 

En ce qui concerne la manière dont ces montants seront répartis entre les CPAS, comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, il ne s’agit pas de simplement transférer ces montants aux CPAS mais bien d’élaborer une politique responsable en collaboration avec eux. L’objectif est de soutenir les CPAS en 3 phases, j’ai d’ailleurs déjà présenté les 3 phases lors d’une interpellation dans la plénière: il s’agit de trois piliers. Tout d’abord une compensation pour le transfert des personnes, les CPAS qui octroient un revenu pour l’intégration aux personnes qui perdent leur allocations suite à la limitation de cette allocation de chômage vont recevoir un pourcentage d’intervention majorée. 2eme pilier: les efforts d’activation fournis par les CPAS comme le PIS, les CPAS qui utilisent le PIS pour l’activation et la réinsertion seront récompensés. Il est important de compenser les efforts, donc pas seulement de se concentrer sur les résultats mais aussi de récompenser les efforts fournis. Certains clients du CPAS ont investi énormément de temps et d’énergie mais ces personnes ne retrouvent pas toujours une insertion dans le marché du travail, donc il faut quand même récompenser les efforts. Troisième pilier, une récompense pour le résultat donc le nombre de personnes qui retournent sur le marché du travail. Ce sont les 3 critères qu’on utilisera pour octroyer cette compensation au CPAS. 

J’ai reçu quelques questions concernant la concertation entre les cabinets, les régions, et les services d’emploi. Il y a énormément de concertations, c’est important, car c’est en coopération avec ces services là que nous allons implémenter cette réforme. Mon cabinet s’est réuni chaque mois avec la fédération des CPAS, mon cabinet participe à la conférence interministérielle en poids qui est organisé  par le cabinet du ministre Clarinval et qui est organisé en coopération avec les fédérations des CPAS, les ministres compétents pour l’emploi des etats fédérés et l’onem. On s’est réunis à cette conférence interministérielle, la première a eu lieu le 6 juin et il y aura encore quelques réunions et mon cabinet sera impliqué lors de chaque réunion.

En ce qui concerne la limitation de l’allocation de chômage dans le temps et la compensation de CPAS une task force a été créée qui réunit d’une part mon cabinet et de l’autre le SPP intégration sociale le cabinet du ministre clarinval l’onem et la fédération des CPAS. Cette task force s’est réunie pour la première fois le 24 juin et il va de soit qu’il y aura encore des réunions de cette task force. En ce qui concerne le conflit d’intérêt lancé par la cocom et l’impact budgétaire cette procédure n’influence pas les travaux au sein de cette chambre le collège compétent pour la COCOM n’est pas compétent pour lancer une procédure sur les conflits d’intérêts sur une proposition de loi à la chambre. Je comprends les inquiétudes de la COCOM mais je souhaite entrer en concertation avec les terrains et créer un mécanisme de compensation solide pour mener une politique responsable. Et nous avons des concertations régulières à ce sujet. 

Ma réplique : 

Merci pour les réponses apportées. Néanmoins, je constate que l’Arizona veut aller très vite dans la mise en place de la réforme parce que c’est une victoire au sein de l’Arizona. C’est une réforme historique. Il est donc très important pour vous, au niveau de votre communication, d’annoncer avant l’été que l’Arizona compte à son actif la limitation des allocations de chômage dans le temps, quand bien même nous constatons qu’on n’a pas le début d’une idée de la façon dont cela se traduira concrètement sur le terrain. Vous nous parlez de la Conférence interministérielle et d’une task force. Les CPAS sont en panique car ils ne reçoivent aucune information sur la façon dont cela va se dérouler. Vous avez interrompu les subsides pour l’insertion et la participation, qui étaient utiles pour soutenir des personnes sur le terrain. En raison de ces limitations budgétaires, les CPAS sont aujourd’hui obligés de licencier. Vous leur demanderez de réembaucher en janvier, alors que les assistants sociaux vivent une détresse terrible, que cette filière souffre d’une désaffection, et que le métier en pénurie.

Aujourd’hui, il faudrait aux CPAS de la clarté quant au cap et aux objectifs ainsi que sur le moment auquel ils pourront embaucher. Il faudrait envoyer un signal clair aux assistants sociaux pour leur dire qu’il y aura du boulot à partir de janvier. Aujourd’hui, on navigue complètement à vue dans ce dossier. Vous ne savez pas où vous allez, vous agissez aujourd’hui et vous verrez après. Cela ne va pas! Vous êtes en train de créer une panique
tant auprès des professionnels que des personnes concernées. On sait que les personnes qui cherchent du travail, qui sont âgées, n’en retrouveront pas. Certaines redoutent de perdre le seul revenu auquel elles ont accès. Ma crainte profonde est que des personnes se retrouvent privées de ressources pendant une certaine période car leur dossier ne sera pas traité dans les temps parce que les CPAS seront dans l’incapacité de le faire. Ces personnes se retrouveront alors avec des arriérés de loyer, ce qui les amènera à perdre leur logement. Cela créera une spirale infernale vers la descente aux enfers. Je suis extrêmement inquiète des conséquences tangibles sur l’aggravation de la pauvreté dans notre pays en raison de ce manque d’anticipation et de professionnalisme dans le suivi de ce dossier. Je demande donc que ce gouvernement se ressaisisse et ralentisse sa réforme tant qu’il ne sait pas exactement où il va. C’est en effet une bonne chose que nous ayons pu exiger un ralentissement du dossier lors de la séance plénière de la semaine dernière car tout ce que j’entends ici ne fait que me conforter dans la nécessité de mettre cette réforme sur pause parce que vous ne savez pas où vous allez.

Nous suivrons évidemment l’évolution de ce dossier de près.