Cette question a été adressée au Ministre de la Mobilité, Jean-Luc Crucke, lors de la commission Énergie, Environnement et Climat du 12 mars 2025. Le compte-rendu complet est disponible ici.
Monsieur le Ministre,
Votre accord de gouvernement prévoit ceci en matière de pension du personnel de la SNCB:
« L’âge de la retraite des militaires (56 ans) et du personnel de la SNCB (55 ans) est progressivement porté à l’âge légal de la retraite des autres salariés et fonctionnaires. A partir du 01/01/2027, l’âge de la retraite sera progressivement relevé de 1 an par an, tout en respectant les attentes légitimes des personnes proches de l’âge de la retraite pour lesquelles nous prévoyons une période et des mesures transitoires suffisantes, en concertation avec les organisations sectorielles. Les mesures nécessaires en matière de travail adapté seront prises. La pension basée sur l’âge pour les militaires et à la SNCB sera transformée en « pension sur demande ». À l’avenir, ils pourront donc toujours prendre une retraite anticipée selon les conditions de carrière et d’âge en vigueur. Nous reconnaissons ici la spécificité du statut militaire, où leur participation à des missions extérieures et à des unités opérationnelles est valorisée positivement et prise en compte. »
En tant que Ministre de la Mobilité, la partie relative au personnel de la SNCB vous concerne au premier chef, étant entendu que les dispositions actuelles ne concernent que le personnel roulant de la SNCB et sont d’ores et déjà conditionnées et que leur révision suscite légitimement beaucoup de questions parmi les travailleurs concernés.
Monsieur le Ministre:
– Pouvez-vous nous rappeler quelles sont les dispositions actuelles précises concernant les pensions du personnel roulant de la SNCB?
– Pouvez-vous nous indiquer, pour les cinq dernières années, le nombre de travailleurs de la SNCB qui ont fait valoir leur droit à la pension à 55, 56, 57, 58, 59 ou 60 ans?
– Disposez-vous, de la même manière, de prévisions pour ce qui concerne les prochaines années en terme de départ à la pension de ce personnel roulant? Pouvez-vous me les communiquer?
– Ne craignez-vous pas, vu cette partie de l’accord de gouvernement, que ça ne conduise à des décisions personnelles d’anticipation des départs chez les travailleurs concernés, aggravant l’actuelle pénurie parmi le personnel roulant?
– Que comptez-vous mettre en œuvre pour préserver et renforcer l’attractivité de ces métiers essentiels pour la mobilité?
– Comment comptez-vous vous impliquer dans ce dossier en tant que Ministre de la Mobilité, afin d’obtenir, comme c’est le cas pour les militaires, des dispositions qui tiennent compte de la pénibilité effective des carrières des travailleurs concernés?
Réponse du Ministre Crucke
Madame Schlitz, les dispositions légales les plus importantes concernant le personnel roulant de la SNCB sont la loi de 1961, et plus précisément son article 115; la loi du 28 décembre 2011 portant des dispositions diverses, titre 8, chapitre 1er, et notamment les articles 88 et 105, tels que modifiés par la loi du 13 décembre 2013.
En ce qui concerne les cinq dernières années et le nombre de travailleurs de la SNCB qui ont fait valoir leur droit à la pension entre 55 et 60 ans, l’âge moyen des membres du personnel de la SNCB, toutes fonctions confondues, ayant sollicité leur mise à la retraite était de 60,6 ans en 2021, 60,7 ans en 2022, 61,1 ans en 2023 et 62 ans en 2024.
En 2024, 32 conducteurs de train ont demandé leur mise à la retraite. Le tableau précise la répartition suivante: 3 à 55 ans; 4 à 56 ans; 1 à 57 ans; 1 à 58 ans; 1 à 60 ans; 7 à 61 ans; 2 à 62 ans; 2 à 63 ans; 5 à 64 ans; 6 à 65 ans.
En 2024, 37 accompagnateurs de train ont demandé leur mise à la retraite. Le tableau de répartition me permet de vous fournir les renseignements suivants: 6 à 55 ans; 1 à 57 ans; 2 à 60 ans; 4 à 61 ans; 3 à 62 ans; 8 à 63 ans; 2 à 64 ans; 11 à 65 ans.
En ce qui concerne les prochaines années, en termes de départ à la pension, il n’est pas possible de faire des prévisions fiables pour l’avenir compte tenu, entre autres, des modifications de la législation concernant l’âge légal de la retraite, le bonus pension, les retraites pour raison médicale et d’autres critères encore.
Vous me demandez si je crains, vu l’accord de gouvernement, que ça ne conduise à des décisions personnelles d’anticipation des départs chez les travailleurs concernés, aggravant l’actuelle pénurie parmi le personnel roulant. Je dois vous dire que je n’ai pas cette crainte, mais je suis persuadé que la concertation sociale permettra également de clarifier certains propos qui, parfois, ne coïncident pas avec l’esprit et la lettre de l’accord de gouvernement.
Vous me demandez ce que je compte mettre en œuvre pour préserver et renforcer l’attractivité de ces métiers essentiels pour la mobilité. La SNCB applique à cet égard une stratégie de marque employeur très puissante. Tout au long de l’année, des campagnes, des événements propres, des salons de l’emploi, une collaboration avec des partenaires et de nombreuses autres actions garantissent un afflux suffisant. L’année dernière, la SNCB a enregistré un nombre de records de candidatures et a d’ailleurs atteint son objectif de recrutement. En effet, 1300 recrutements étaient nécessaires en 2024 et la SNCB en a réalisé 1337. Pas plus tard que cette semaine, une session de formation organisée au sein d’Infrabel sur le recrutement de personnel spécifique a rencontré un franc succès.
Enfin, sur l’intégration des dispositions qui tiennent compte de la pénibilité effective des carrières des travailleurs concernés, je n’ai pas été impliqué dans la compétence qui relève exclusivement d’un collègue chargé du dossier des pensions, mais si j’avais une suggestion à lui faire, c’est de faire confiance au dialogue social. C’est d’ailleurs ce qu’il a commencé à faire, semble-t-il, aujourd’hui.
Ma réponse
Monsieur le Ministre, je vous remercie pour vos réponses.
Les chiffres montrent bien à quel point les départs anticipés à la pension sont modérés, contrairement à ce que certains de vos collègues au sein du gouvernement Arizona ont tendance à dire. Ils caricaturent la fonction publique et les fonctionnaires sans évoquer, à aucun moment, la pénibilité de ces métiers ni le fait que ces personnes aient des carrières longues. Elles se sont projetées dans cette carrière-là, parfois en se disant que ce n’était peut-être pas le métier de leurs rêves, mais qu’elles allaient l’exercer car il présente certains avantages, mais aussi des inconvénients. Dès lors, changer les règles du jeu en cours de route, c’est une véritable trahison. Et c’est valable dans d’autres domaines en matière de pension.
Ces personnes ont planifié leur carrière sur la base du fait qu’elles pourraient partir plus tôt et ont mordu sur leur chique, se disant qu’il y aurait quand même une carotte au bout du chemin. La transformer en bâton, pour moi, c’est un véritable problème.
J’entends votre volonté de dialogue et je la salue, vraiment. Maintenant, je compte sur vous pour convaincre vos collègues de l’Arizona de cette nécessaire mise en dialogue, parce que ce n’est pas ce qu’on entend. On entend des clichés sur les syndicats, sur la fonction publique, sur les travailleurs mais on n’entend pas une volonté de trouver des solutions pour chacun et chacune en fonction de la pénibilité de son métier et de ses réalités.
J’entends votre parole mais je vois aussi le projet dans l’accord de majorité et les propos des autres. Permettez-moi dès lors de douter de l’effectivité de cette bonne volonté.