Question d’actualité posée en plénière au Premier Ministre Bart de Wever le 16 octobre 2025. Le compte rendu intégral de la séance peut se trouver ici.

Monsieur le Premier Ministre,

Mardi, plus de 140.000 personnes sont descendues dans la rue.

J’ai vu des profs en colère, parce que certains de leurs collègues vont perdre leur travail.
Des soignantes qui n’en peuvent plus, et qui n’entendent pas une mesure qui va les soulager. La moitié des infirmiers en Wallonie se disent en mauvaise santé.
Des sages-femmes, parce que leur métier compte pour rien. Celles qui ont entamé des études ne seront pas épargnées par la limitation du chômage. 90% d’entre elles faisaient grève au CHU de Saint Pierre.
Des étudiants, dont le minerval va passer à 1200 € alors qu’il payent déjà 600 € par mois pour un kot.
Vous voyez ce pote qui soupire quand on parle politique et qui ne veut pas dire pour qui il vote. Et bien il était là. La je me suis dit “il se passe quelque chose”
Ce qui l’a fait venir dans la rue, c’est votre mépris.
Parce que depuis des semaines, on vous entend étaler votre mépris dans la presse et sur les réseaux sociaux. Tiens, et si on augmentait la TVA ? Et si on coupait dans les alloc familiales? Et si on augmentait le prix de la consultation chez le médecin? Et si on faisait un saut d’index?
Ils voient aussi votre mépris des victimes des inondations 2021, en n’avançant aucune mesure pour que ça ne se reproduise plus jamais.
Et le pire, c’est que ces mesures sur lesquelles vous vous écharpez au lieu d’améliorer la vie des belges, vont aggraver la situation ! En 2029, c’est 8 milliards qui manquera dans la sécu à cause de votre gouvernement.

Monsieur le Premier Ministre,

Pouvez vous me citer les mesures que vous allez prendre pour améliorer la vie des belges, et répondre à leur demandes légitimes ? Je veux du concret, pas des petites phrases.

La réponse du Premier Ministre :

 

Monsieur le Président, chers collègues, je ne vais pas vous ennuyer en répétant l’analyse budgétaire que j’ai présentée ici la semaine dernière. Les chiffres exacts sont connus, ou devraient l’être.

Au sein du gouvernement, les discussions se poursuivent afin d’améliorer considérablement le solde à court terme d’ici la fin de cette législature. Si nous nous limitions au budget de 2026, j’aurais pu me présenter ici mardi dernier sans manque de sommeil et avec un sourire proverbial – proverbial, j’insiste.

Cependant, le gouvernement a délibérément et unanimement choisi de mener un exercice plus ambitieux, qui s’étendra jusqu’à la fin de cette législature. Je considère en effet que cela est nécessaire pour maintenir la confiance dans notre reprise, tant au niveau national qu’international.

Le gouvernement convient qu’un effort structurel minimal de 10 milliards d’euros sera nécessaire d’ici 2030. Dans le scénario optimal, cet effort pourrait même atteindre 20 milliards d’euros, mais 10 milliards d’euros constituent le minimum pour respecter la norme européenne en matière de dépenses.

Cet effort supplémentaire s’ajoute aux réformes qui ont été finalisées au printemps et cet été, sur lesquelles le gouvernement continue de travailler et que nous espérons pouvoir soumettre au vote avant la fin de l’année. Ces réformes auront des retombées budgétaires importantes à long terme, mais je tiens à souligner qu’elles permettront également de réduire la dette de 15 milliards d’euros au cours de cette législature.

Le gouvernement mène actuellement ce nouvel exercice de manière approfondie pour les années à venir, tout en étant bien conscient qu’il n’existe pas mille façons d’atteindre le montant nécessaire. J’espère que nous pourrons rapidement parvenir à un accord, mais je n’en suis pas sûr. Je pense que le sens des responsabilités devrait tous nous y obliger. Car l’effort que nous ne réalisons pas aujourd’hui ne fera que se démultiplier dans les années à venir, avec les intérêts en prime. Il n’y a pas d’autre choix, il n’y a pas d’alternative. Ne rien faire ne ferait qu’aggraver le problème. C’est une logique implacable à laquelle nous ne pouvons pas échapper.

Certaines personnes ici ne me croiront peut-être pas, mais je pense que nous devons avoir de l’empathie pour celles et ceux qui s’inquiètent de la lourdeur des efforts à fournir. Nous tenterons d’en tenir compte autant que possible.

Peu importe d’ailleurs que des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers ou des millions de personnes aient défilé à Bruxelles. Nous poursuivons donc simplement le dialogue social. La réalité est toutefois que, dans ce pays, on a détourné le regard des problèmes pendant des décennies. Les dix milliards d’euros d’intérêts que nous devons payer chaque année aujourd’hui ne sont pas tombés du ciel.

C’est pourquoi je vous dis que continuer à fermer les yeux n’est pas une option pour moi. Ce n’est pas une option. Si nous ne sommes pas capables de prendre des décisions difficiles, nous ne sommes pas capables de gouverner.

Chers collègues, j’espère donc que nous serons en mesure de le faire. Cela constituerait pour ce gouvernement le deuxième chapitre du sauvetage de notre État-providence. C’est un objectif que nous devrions tous partager.

Ma réplique :

Monsieur le premier ministre, je pense que vous ne vous rendez pas compte du point de non-retour vers lequel nous sommes en train d’aller.

Aujourd’hui, certaines personnes et catégories professionnelles espèrent que vous les oublierez. Elles retiennent leur souffle en espérant ne pas être impactées par vos mesures. En fait, les gens espèrent juste que vous ne toucherez pas à leurs conditions et ont perdu l’espoir que vous les améliorerez.

Imaginez l’impact que votre gouvernement a sur la confiance que la population accorde aux politiques, et sur l’espoir que peut encore susciter la politique d’améliorer la vie des gens. Or, pour moi, faire de la politique, c’est entendre les difficultés et pouvoir y apporter des réponses – évidemment, dans un certain contexte –, mais c’est en tout cas la boussole qui devrait vous guider. En tout cas, en ce qui me concerne, c’est cette boussole qui guide mon action politique. J’espère que vos discussions seront de cet ordre-là.

Je vous remercie.