Madame la Ministre,

L’application de rencontres Grindr sert régulièrement à tendre des guet-apens homophobe, l’un ayant entrainé la mort d’un homme fin août à Bruxelles. Deux autres personnes ont été blessées.  Depuis, trois suspects, dont un mineur, ont été interpellés. D’après l’association Ex Æquo, plus de dix guets-apens via Grindr ont été recensés en quelques mois. Et ça ne serait que la pointe visible de l’iceberg.

Ces faits posent de sérieuses questions sur la vulnérabilité des utilisateurs d’applications de rencontres face à de tels pièges. Ils doivent ouvrir les yeux des responsables politiques sur la récurrence des guets-apens visant les utilisateurs d’applications de rencontres, en particulier ceux appartenant à la communauté LGBTQIA+, qui se retrouvent fréquemment pris pour cible dans des attaques violentes et homophobes.

Les personnes LGBTQIA+ sont régulièrement victimes de violences, insultes, discriminations dans l’espace public. Lorsqu’elles cherchent à éviter ces violences en relationnant en ligne, elles sont à nouveau prises pour cible. La Belgique, perçue comme une pionnière des droits LGBTQIA+, doit garantir la sécurité des personnes LGBTQIA+. ​​

Madame la Ministre,

Quelles actions avez-vous entreprises suite à cette attaque?

Plus globalement, quelles mesures le gouvernement envisage-t-il pour renforcer la sécurité des utilisateurs de ces applications et mieux prévenir les agressions ciblant des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre?

Avez-vous déjà établi un contact avec la direction de Grindr Belgique pour envisager des pistes d’action?

Avez-vous rencontré les associations de personnes concernées pour définir avec elles des pistes d’action?

  • Réponse de la Ministre de l’Intérieur

Chers collègues, tout d’abord, la circulaire COL 13/2013, actualisée en avril dernier, prévoit la prise en charge des victimes de discrimination et des crimes de haine, y compris à l’égard des LGBTQIA+. Au sein de la police intégrée, des agents de référence ont été nommés et formés pour soutenir, informer et aider leurs collègues dans les différentes zones de police locale et dans les entités de la police fédérale. Face à la recrudescence du phénomène, des conseils ont été diffusés par des associations comme Rainbow Cops Belgium afin de maximiser la sécurité de la population lors de telles rencontres.

Ces conseils préconisent de toujours échanger les numéros de téléphone avant un rendez-vous et de partager ces informations avec une personne de confiance, voire de discuter au téléphone ou en visioconférence avant la rencontre, de choisir un lieu de rendez-vous public que l’on connaît bien, d’être éventuellement prêt à envoyer discrètement des alertes d’urgence via son téléphone et, si l’on invite quelqu’un chez soi, de contrôler visuellement l’identité de la personne avant d’ouvrir la porte.

En cas d’agression, il est essentiel de signaler les faits. La police et les organismes comme Unia sont à disposition pour ce faire. À Bruxelles, la Rainbow House offre également un soutien via WhatsApp ou par mail. Quant au Centre de Prise en charge des Violences Sexuelles, il offre des soins et un accompagnement aux victimes de violences sexuelles.
En ce qui concerne la formation policière, les aspirants inspecteurs apprennent dans les différents clusters de la formation de base à accueillir les plaignants avec compétence, flexibilité et qualité, et toujours en les traitant de manière appropriée quel que soit le contexte. En outre, la formation de base accorde une attention particulière à la coopération de la police intégrée avec les institutions et les organismes travaillant dans le domaine de la discrimination et du racisme en vue d’un aiguillage correct. Des modes de formation continuée ont également été développés en étroite collaboration avec Unia concernant les personnes de référence ou le cadre légal et les applications de la COL 13/2013.

  • Ma réplique

Madame la ministre, merci pour vos réponses. J’entends en effet l’ensemble des propositions que vous émettez en matière de prévention mais en fait, elles finissent par reposer sur les victimes elles-mêmes. On leur conseille, par toute une série d’astuces – qui sont de bonne volonté –, de prendre ellesmêmes en charge leur propre sécurité. Cela me pose problème parce que c’est déjà ce que ces gens font en permanence. Le fait d’aller en ligne pour « relationner » est déjà une stratégie d’évitement parce que dans l’espace public et dans la vie réelle, ces gens sont déjà victimes d’agressions, de regards déplacés, de réflexions désagréables, etc.

En tant que responsables politiques, nous ne pouvons pas nous dire que la bonne réponse à cela est de s’appuyer sur les associations pour conseiller les personnes concernées sur ce qu’elles doivent faire pour ne pas tomber dans le panneau. Je pense que c’est vraiment essentiel de se le dire. En effet, nous pouvons saluer le rôle des associations qui travaillent dans le domaine. N’oublions pas cela au moment des budgets. Nous avons besoin de ces associations pour continuer à garantir aux personnes LGBTQIA+ de mener une vie digne et, en particulier, de garantir leur sécurité. Chers amis négociateurs et négociatrices, n’oubliez pas cet élément.

J’entends quelles sont les limites légales par rapport aux plateformes. Maintenant, je pense qu’engager des négociations avec elles et pouvoir taper du poing sur la table en leur disant qu’elles doivent mettre des mesures en place pour élever les standards en matière de prévention et de sécurité de leurs applications est une chose que vous pouvez faire en dehors du cadre légal strict. J’espère que les négociateurs et négociatrices pourront joindre les actes à la parole lors des négociations pour le prochain accord de gouvernement.