Le 2 décembre dernier, la veille de l’ouverture de la COP 24 à Catowice, 75.000 personnes descendaient dans les rues de Bruxelles pour réclamer des mesures climatiques fortes.
La SNCB s’est totalement laissée dépasser par ce mouvement de masse et de nombreux manifestants sont littéralement restés sur le quai. J’ai interrogé le ministre en charge de la SNCB, François Bellot, sur la gestion de cet événement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, j’ai une question concernant la gestion des transports pendant la manifestation de dimanche dernier.
La journée de dimanche, qui devait être une fête et un moment particulier pour le rail dans un contexte de manifestation pour le climat, a malheureusement été perçue comme un échec pour la SNCB. De nombreux navetteurs sont restés sur les quais à l’aller et l’affluence était telle au retour que les gares sont restées saturées durant plusieurs heures. La SNCB n’avait clairement pas bien anticipé cette situation et sa réputation est à nouveau écornée durablement, alors même qu’elle sera et est déjà une des réponses à l’urgence climatique.
Quelques chiffres
Pourtant, les signes de mobilisation de grande ampleur étaient nombreux: 16.000 “green tickets” vendus en prévente, les évènements Facebook cumulés annonçaient plus de 60.000 personnes “intéressées”, auxquels s’ajoutaient 40.000 “participants” déclarés, 20.000 personnes avaient fait la démarche de s’inscrire sur le site Web de l’action 8 jours avant la date de la marche et plus de 30.000 en fin de semaine. Il ne fallait pas s’attendre à ce que les participants viennent en voiture à une marche pour le climat.
Certes, la mobilisation a été encore beaucoup plus importante qu’espérée, mais les moyens supplémentaires étaient totalement sous-évalués. À Gembloux ou à Liège, par exemple, un seul train supplémentaire a été prévu au départ vers Bruxelles. Sur la ligne 161, la desserte des gares intermédiaires n’a pratiquement pas été renforcée. L’IC Anvers-Charleroi composé d’un seul Desiro – ce qui n’est déjà pas acceptable en temps normal – est resté en composition identique, etc. Les exemples sont nombreux. Et la gestion des retours a été aussi difficile.
Évidemment, nous sommes conscients de la gestion qu’implique un tel événement, surtout quand celui-ci ramène deux fois plus de personnes que prévu. Nous sommes aussi conscients qu’un train demande une logistique importante : un conducteur ou une conductrice qui maîtrise la ligne et le matériel disponible, un accompagnateur ou une accompagnatrice, un train apte à rouler, un sillon, etc. Malgré tout, on peut déplorer un manque de prévoyance, ainsi qu’un manque de flexibilité pour adapter la planification à court terme. Notamment, sur le retour, une fois que le nombre exceptionnel de manifestants était connu.
Monsieur le ministre,
- Quelle est la procédure d’évaluation de la fréquentation d’événements de ce type? Quel était le dispositif exceptionnel initialement prévu?
- Suffisait-il à accueillir les 30.000 voyageurs annoncés par les organisateurs?
- Quelles actions ont été mises en œuvre en cours de journée, une fois le nombre de manifestants connu?
- Comment améliorer la planification à court terme du réseau SNCB?
Réponse de François Bellot, ministre
Madame Schlitz, tout d’abord, je vous rappelle que l’organisateur, quand il est intervenu au journal télévisé de RTL-TVI la veille de la manifestation, indiquait qu’il serait heureux si la participation à la manifestation était de 25.000 personnes. Je vous renvoie sur leur site.
Deuxième élément, il faut savoir que pour cette manifestation Claim the Climate, j’ai demandé à la SNCB d’établir un Green Ticket, ce qui a été fait. Mais je rappelle que l’estimation était d’à peu près 25.000 participants, dont une partie ne venait pas en train.
La SNCB m’informe que le dimanche 2 décembre, elle a mené une concertation permanente avec les services de police, et ce à différents niveaux, à la suite de l’afflux. En ce qui concerne le voyage aller, pour acheminer les manifestants, la SNCB a reçu les premiers messages l’informant de la suroccupation de plusieurs trains à partir de 11h.
Plusieurs procédures ont immédiatement été initiées en interne, afin de gérer l’affluence, supérieure aux prévisions, des participants à la manifestation. L’accueil à Bruxelles-Nord a été renforcé par la présence de policiers et d’agents de Securail. Vers 12h40, la police a ordonné d’imposer un stand and go du trafic ferroviaire en gare de Bruxelles-Nord afin d’assurer la sécurité des voyageurs débarquant dans cette gare. La mesure a duré 15 minutes.
En raison de l’affluence de voyageurs, massive et supérieure aux prévisions, la SNCB a mis en service quatre trains supplémentaires, offrant 4.645 places. La composition d’un grand nombre de trains a également été renforcée, portant le nombre de sièges supplémentaires à 11.000 par rapport au trafic normal.
En ce qui concerne le voyage retour pour ramener les manifestants, il a été conseillé aux voyageurs à Bruxelles-Schuman de prendre le métro pour rejoindre la gare de Bruxelles-Centrale ou de prendre leur train au départ de Bruxelles- Schumann. Un service de navettes composées de deux rames d’une capacité respectivement de 1.000 et 750 voyageurs a été mis en service entre Bruxelles-Schuman et Bruxelles-Nord. Les navettes ont effectué ce trajet six fois au total.
En plus de cette offre, un autre train supplémentaire d’une capacité de 1.000 voyageurs a été mis en service entre Bruxelles-Schuman et Namur et cela, en plus de l’offre supplémentaire déjà prévue en matinée. Des mesures ont également été prises en gare de Bruxelles-Centrale, afin d’assurer la sécurité des voyageurs lors de leur voyage retour. Un stop & go du trafic d’environ 2h30 y a également été ordonné. La SNCB m’indique avoir réagi en temps réel à l’afflux des voyageurs.
J’ajouterai personnellement que, lorsqu’une manifestation de ce type sera programmée à l’avenir, il faudra, en cas de vente de tickets particuliers, que la SNCB arrête cette offre au plus tard le samedi midi de sorte qu’elle puisse estimer le nombre de voyageurs intéressés par le déplacement. Cela lui donnera le temps nécessaire, la veille à midi jusqu’au moment de la manifestation, d’organiser son offre de transport.
Il faut savoir qu’un grand nombre de tickets ont été achetés aux automates et aux guichets dans les dernières heures et au moment des départs. Tant mieux pour le succès, mais on était loin de ces prévisions à entendre les interlocuteurs. Cette expérience servira pour l’avenir. La SNCB a fait tant bien que mal et plutôt bien que mal face à cet afflux que personne n’avait prévu.
Ma réplique
Monsieur le ministre, je vous remercie pour vos réponses.
Je suis contente de voir que des pistes se dégagent de l’évaluation de cette journée. En effet, peut-être qu’arrêter les tickets la veille pourrait permettre de mieux anticiper ce problème.
J’ai l’impression qu’il faudrait également évaluer la réactivité sur le moment. Vous dites que la SNCB a mis en place certaines choses, mais le résultat est là: la gare de Bruxelles-Central a été fermée pendant un long moment, les gens ne pouvaient plus rentrer chez eux et cette situation a été perçue comme très chaotique. Il faudrait réfléchir à plus de flexibilité pour ce genre d’événement.
Pour renforcer l’offre, il est aussi possible d’augmenter le nombre de wagons. Si ce n’est pas possible d’en ajouter, le maintien d’une série de wagons de première classe dans les trains n’est peut-être pas indispensable dans la mesure où le but est de pouvoir transporter un maximum de personnes et que les wagons de première classe ne permettent pas de maximiser le nombre de places disponibles.
J’espère que d’autres évaluations plus approfondies seront faites de cet événement.
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