Monsieur le Ministre,

Une étude de Sciensano révèle que les contaminations au VIH sont en augmentation en Belgique depuis trois ans. Quelles actions avez-vous entrepris depuis le début de la législature pour contrer l’aggravation de cette épidémie? Sciensano émet des recommandations, comme étendre encore l’éducation à la vie sexuelle, relationnelle et affective; encourager l’utilisation du préservatif; optimiser l’accès aux autres outils de prévention pour les jeunes et les personnes à risque; promouvoir le dépistage du VIH et des IST chez les jeunes et les personnes à risque; élargir l’accès à la PrEP et diversifier son modèle de délivrance afin d’atteindre efficacement un plus grand nombre de personnes à haut risque d’infection par le VIH. Une Conférence interministérielle a-t-elle été convoquée au sujet de la pandémie de VIH? Des contacts ont-ils été pris avec des associations représentant les différents groupes les plus à risque de contamination par le VIH?

Réponse de Frank Vandenbroucke, ministre de la Santé publique (en néerlandais et en français) :

La hausse du nombre de diagnostics de VIH montre bien que le virus se transmet de plus en plus en Belgique, malgré nos stratégies de prévention. La « prévention combinée » ne suffit plus. La politique en la matière doit donc être renforcée. Pour renforcer la lutte contre le VIH, il faut un cadre politique clair. Le Plan national VIH comprend des actions portant sur la prévention, le dépistage, la prise en charge et la qualité de vie. Après son approbation en 2022, un budget d’un million d’euros a été prévu pour des actions prioritaires.

Pour améliorer l’utilisation du traitement préventif (PrEP), un accès alternatif a été prévu pour les travailleurs du sexe ayant peu accès aux soins de santé. Afin de mieux dépister les personnes vulnérables, le dépistage combiné VIH et IST a été adapté pour les prestataires non médicaux par arrêté royal en 2023. Les actions ont également porté sur l’accessibilité au vaccin pour les personnes vivant avec le VIH et la qualité des soins. Une convention pour la prise en charge psychosociale des personnes vivant avec le VIH sans assurance maladie a été mise en place entre l’INAMI et les centres de référence VIH.

En 2023, 8 727 personnes ont utilisé la PrEP. Le nombre d’utilisateurs augmente constamment depuis 2017, année où la PrEP est devenue disponible. Elle est utilisée à 99 % par des hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, et qui constituent dès lors le groupe cible le plus touché. Les soins liés à la PrEP sont désormais centralisés dans douze centres de référence VIH. Ces centres sont bien répartis afin de garantir l’accessibilité des soins. (En français) Des lacunes dans la couverture persistent. Cet outil de prévention étant assez récent, il faut réfléchir à la diversification de la délivrance de la PrEP. Le réseau PrEP peut fournir des conseils en la matière. Un modèle d’accès étendu est celui de sa délivrance pour les travailleurs du sexe; sa mise en œuvre est en cours.

Depuis le 1er mai 2023, les spécialités pour la PrEP sont remboursées si elles ont été prescrites par un médecin lié à un centre de référence VIH, y compris lorsqu’il s’agit d’un médecin généraliste. La prescription ne doit donc pas émaner exclusivement d’un médecin spécialiste.

Les centres de référence VIH ont développé des stratégies pour faciliter l’accès à la PrEP, avec des consultations de suivi par des généralistes voire par les infirmières des centres.

En fait, la question est de savoir si nous devons autoriser tous les médecins généralistes à prescrire un traitement PrEP. Les avis des experts divergent car souvent les médecins généralistes ne possèdent pas les connaissances requises. Nous devons trancher cette question.

En comparaison avec d’autres pays, la Belgique procède à des dépistages fréquents et constants, 64 tests VIH ayant été effectués par 1 000 habitants en 2023. Parmi les diagnostics, 55 % sont posés par des médecins généralistes et le reste par des spécialistes. Cela montre clairement que chaque médecin doit pouvoir effectuer le test de dépistage du VIH. Il existe également des dépistages anonymes facilement accessibles et des dépistages effectués dans des environnements non cliniques. Ils s’adressent à des personnes qui ne sont pas intégrées dans notre système de soins de santé. Nous devons continuer d’investir dans la formation des médecins pour promouvoir la santé sexuelle et tester proactivement. Je pense qu’en collaboration avec les entités fédérées, nous devons évoluer vers des actions plus ciblées, certainement dans les zones où le nombre de diagnostics est élevé. Le rôle des organisations de terrain est très important à cet égard. En outre, la prévention doit se concrétiser dans les entités fédérées et demeure essentielle dans la mesure où elle met l’accent sur les campagnes de sensibilisation, sur le travail de prévention sur le terrain ainsi que sur l’éducation sexuelle et relationnelle, en particulier pour les jeunes. La consommation de drogues joue un rôle, mais la contamination par seringues n’a causé que 3 % des contaminations en 2022 et 2023. Des programmes sont également mis en place pour lutter contre ce phénomène, ce qui est une bonne chose.

Les actions du Plan national VIH ont fait l’objet de discussions au sein de la CIM Santé publique avant validation. Chacune des actions a été validée au niveau fédéral et des entités fédérées. Parmi elles, les priorités citées ont été mises en évidence et ont été présentées et discutées au sein de la CIM. (En néerlandais) Nous n’avons plus discuté en CIM depuis que nous sommes en affaires courantes, mais ce point doit rester à l’ordre du jour. Toute personne à risque doit être pleinement informée, afin d’adopter les moyens de prévention les mieux adaptés à son comportement sexuel. (En néerlandais) La recherche a montré que c’est la combinaison d’un meilleur dépistage, d’un traitement optimal, de la prévention et de la PrEP qui permet la baisse la plus significative des coûts. Il ressort d’études internationales que la PrEP fonctionne parfaitement en prévention lorsque le traitement est pris correctement. Le plan datant de 2022 est en cours d’exécution, mais tout n’a pas encore été mis en œuvre. Il est utile. de faire le point de la situation. Si nous réalisons les objectifs mondiaux de l’ONUSIDA, nous atteindrons également l’objectif général des 86 % de personnes infectées ayant une charge virale réduite. Nous atteignons cet objectif car 87 % du nombre total de personnes contaminées par le VIH dans notre pays ont une charge virale supprimée. Cependant, le pourcentage de personnes contaminées n’ayant pas obtenu de diagnostic reste supérieur à 5 %; nous devons faire mieux. Un comité de suivi effectue un monitoring du Plan national VIH et le sujet doit donc en effet être réinscrit à l’ordre du jour de la CIM.

Ma conclusion:

Premièrement, les données fournies par Sciensano concernant les 20-29 ans sont intéressantes car la courbe s’est stabilisée grâce aux campagnes de sensibilisation et au plan d’action. Deuxièmement, il est essentiel d’écouter les associations qui relatent les réalités du terrain et d’assurer leur financement, qui représentera par ailleurs une économie dans le budget des soins de santé.