Question orale posée à David Clarinval, ministre de l’Emploi, le 10 décembre 2025. Le compte rendu complet de la Commission peut être lu ici.
Ma question :
Monsieur le ministre, vous n’êtes pas sans savoir qu’une pétition circule actuellement pour allonger le congé parental à huit mois et garantir 80 % du salaire. Cette pétition, lancée initialement en Flandre, rencontre un grand succès. Aujourd’hui, elle a recueilli plus de 36 000 signatures.
Nous savons que ce sujet suscite un vif intérêt dans la population: la demande d’allongement de ce congé est largement soutenue, non seulement par la population, mais aussi par les scientifiques, les experts et les médecins, qui estiment qu’un retour trop rapide au travail peut avoir des conséquences graves, tant pour l’enfant que pour ses parents. Par ailleurs, nous savons bien que la dépression post partum touche chaque année 14 000 mères en Belgique. Il s’agit donc d’un phénomène grave auquel il est grand temps de s’attaquer.
Monsieur le ministre, envisagez-vous de répondre positivement à cette pétition? D’autres pays, notamment les pays nordiques, l’ont déjà fait: chaque parent y bénéficie d’un an de congé parental. Cette mesure est également positive en matière de marché de l’emploi et de lutte contre les maladies professionnelles. Actuellement, des parents épuisés se retrouvent régulièrement en incapacité de travail et sont pris en charge par la mutuelle. En leur permettant de disposer du temps nécessaire, cette mesure pourrait, à long terme, s’avérer rentable, sans parler évidemment du bien-être de la population, dont je ne doute pas qu’il vous préoccupe fortement.
Monsieur le ministre, je me réjouis d’entendre votre réponse à cette question.
La réponse du ministre :
Il y a beaucoup de ces pétitions qui circulent pour le moment.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question, qui touche en effet à un sujet essentiel, celui de l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale, et plus particulièrement à la manière dont notre société accompagne les jeunes parents. Je veux d’abord rappeler que le congé parental, de même que le congé de maternité et le congé de naissance, constituent des instruments fondamentaux de notre politique de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Ils traduisent une volonté de permettre à chaque parent de s’investir pleinement dans sa vie familiale, sans devoir renoncer à sa carrière professionnelle.
Comme le souligne l’accord de gouvernement, il est essentiel de permettre à chacun de mieux combiner vie professionnelle et vie privée, et de veiller à ce que les personnes qui souhaitent assumer des responsabilités familiales puissent en avoir la possibilité. L’accord de gouvernement prévoit en outre la mise en place d’un crédit familial, développé en concertation avec les partenaires sociaux. Un crédit familial simplifie les droits de congé pour ceux qui participent aux soins d’un enfant, et harmonise les différents systèmes afin qu’il n’y ait pas de distinction selon le statut de salarié, d’indépendant ou de fonctionnaire.
Chaque enfant reçoit à la naissance un sac à dos de droits de congé, dans lequel sont intégrés les congés existants liés à la naissance et aux soins ultérieurs de l’enfant. À cet effet, une enveloppe annuelle de 25 millions d’euros est déjà prévue au budget pluriannuel, afin de soutenir cette mesure. Dans le cadre des discussions relatives au budget initial 2026, ainsi qu’aux projections pluriannuelles 2027, 2028, 2029, 2030, un budget supplémentaire de 25 millions d’euros est octroyé à partir de 2028.
Le gouvernement a décidé d’une introduction progressive du crédit familial, en utilisant dans une première phase le budget pour introduire une semaine supplémentaire au choix de repos, de maternité ou congé de naissance, à prendre par l’un des deux partenaires, quel que soit le statut professionnel. C’est donc une bonne nouvelle.
Par contre, madame la députée, à ce stade, le gouvernement n’envisage pas d’allonger la durée du congé parental à huit mois. Je souscris pleinement à l’ambition de renforcer l’accompagnement des jeunes parents, mais cette question doit aussi être examinée au regard de la trajectoire budgétaire de notre pays et des équilibres qu’il nous revient de préserver.
Ma réplique :
Monsieur le ministre, votre projet de sac-à-dos de congés est rejeté par tout le secteur qui suit les questions de petite enfance et de droits des familles. Dès lors, je vous enjoins vraiment à revoir ce projet et à rencontrer la Ligue des familles et son homologue flamand afin d’élaborer une réforme qui réponde aux recommandations à des fins d’amélioration que vous ont remises ces secteurs qui connaissent pertinemment bien les besoins des familles. Ce serait une erreur de persister à vous entêter avec ce projet qui va provoquer des tensions familiales et des formes de violence dans les discussions visant la répartition des congés. Il est encore temps de revoir votre copie.
En ce qui concerne le congé de naissance et le congé parental, sous la précédente législature, nous avons prolongé le congé du co-parent à quatre semaines. Il était grand temps: deux semaines, c’était vraiment une honte absolue puisqu’on laissait des mères seules avec leur nourrisson, alors qu’elles étaient complètement épuisées. Par ailleurs, l’impact est énorme sur la manière dont les parents vont se répartir la charge, tandis que cela va créer des inégalités socioprofessionnelles dans le couple. Donc, pour résoudre ces inégalités entre les femmes et les hommes sur le marché du travail, il est indispensable d’imposer un congé égal et allongé. Sous cette législature, vous ne pourrez évidemment pas augmenter d’un seul coup ce congé à huit mois. Néanmoins, votre gouvernement doit prolonger la trajectoire qui a été esquissée sous son prédécesseur pour continuer à étendre le congé, rattrapant de la sorte d’autres pays européens. Aujourd’hui, notre pays fait en effet figure de très mauvais élève dans la classe européenne à ce sujet.
Offrir aux familles la possibilité de mieux concilier vie privée et vie professionnelle constitue donc une question prioritaire, monsieur le ministre.
Je vous remercie.

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