Question orale posée à Anneleen Van Bossuyt, ministre de l’Asile et de la Migration, le 16 décembre 2025. Le compte rendu complet de la Commission peut être lu ici.

Ma question : 

Madame la ministre,

Depuis 2023, des dizaines d’enfants nés en Belgique de parents palestiniens se voient retirer la nationalité belge, qui leur avait pourtant été reconnue à la naissance par les autorités communales. Ces décisions administratives ont plongé au moins 44 familles dans une situation que Myria qualifie « d’insécurité juridique totale ». Ces enfants sont nés en Belgique, y ont toujours vécu, y sont scolarisés, et n’ont connu aucun autre pays que la Belgique. Leur nationalité ne leur a pas été accordée à la suite d’une prétendue fraude, mais sur la base de pratiques administratives communales qui, pendant des années, ont appliqué la législation existante en matière de prévention de l’apatridie. Du jour au lendemain, cette pratique a été remise en cause. À la suite de courriers dits « de sensibilisation » adressés par l’Office des étrangers, certaines autorités locales ont commencé non seulement à refuser l’octroi de la nationalité à de nouveau-nés, mais également à retirer rétroactivement la nationalité d’enfants déjà reconnus comme Belges. Cette évolution est d’autant plus problématique qu’elle s’opère dans un contexte arbitraire, et que les décisions varient d’une commune à l’autre. Pour justifier ce durcissement, l’Office des étrangers évoque des abus et soupçonne certaines femmes palestiniennes de se rendre en Belgique pour y accoucher, afin de permettre un regroupement familial ultérieur. Aucune donnée publique ne permet toutefois d’établir l’ampleur réelle de ces abus. Plus grave encore, le Médiateur fédéral a expressément rappelé que l’Office des étrangers n’est pas compétent en matière de nationalité et qu’il ne peut pas influencer les décisions en la matière. 

Dès lors, madame la ministre, comment expliquer ces décisions sur une base légale? Ne considérez-vous pas que ceci porte atteinte au principe de sécurité juridique? Comment expliquez-vous que la prévisibilité du droit puisse varier selon la commune dans laquelle un enfant est déclaré? Quelles mesures immédiates envisagez-vous d’adopter afin de clarifier les règles applicables, de restaurer la prévisibilité du droit pour les familles concernées et d’éviter que des enfants ne se retrouvent durablement dans une situation d’incertitude juridique?

La réponse de la ministre : 

Je tiens à vous rassurer. Les enfants dont vous parlez sont enregistrés sous la nationalité palestinienne ou une autre nationalité, car l’un de leurs parents possédait une nationalité différente. Ils n’ont pas été enregistrés comme apatrides.

Les enfants suivent le statut de résident de leurs parents. Dans la plupart des cas, ces parents ont demandé une protection internationale. D’autres ont déposé une demande de titre de séjour pour d’autres raisons.

Il est également important de noter que certains parents palestiniens bénéficiaient déjà du statut de réfugié dans d’autres États membres de l’Union européenne. Autrement dit, ces parents peuvent retourner dans ces autres États membres avec leurs enfants, car ils conservent leur statut de protection.

La lettre, adressée à toutes les autorités locales et accessible via la procédure d’accès public du gouvernement, précise que les parents sont titulaires de passeports nationaux mentionnant explicitement la Palestine comme nationalité. Ces passeports constituent des documents de voyage internationalement reconnus et doivent être traités comme tels.

Mme Daems précise également que les deux parents peuvent transmettre leur nationalité à leurs enfants et que l’enfant peut avoir une nationalité différente, soit parce que l’un des parents a une nationalité différente, soit parce que, dans le pays où la famille résidait auparavant et où l’enfant est né, le droit de résidence est considéré comme un fondement pour l’acquisition de la nationalité. Les parents peuvent également s’adresser à la mission palestinienne pour obtenir un passeport pour leurs enfants nés en Belgique.

Le service de l’immigration précise qu’en cas de doute, l’administration municipale peut consulter le parquet compétent. Le service de l’immigration n’émet aucune instruction, n’ayant pas compétence en la matière. Il exprime toutefois son inquiétude quant à l’hétérogénéité de la procédure et confirme que si la nationalité palestinienne des parents ne peut être établie, l’article 10 du Code de la nationalité belge sera appliqué.

Madame Schlitz, ses services reposent sur un usage abusif des lacunes de la nationalité perpétuées par les parents et la délibération de certaines communautés belges quant à la nature juste de leurs enfants et à la perpétuation paresseuse de la nationalité belge.

Le service de l’immigration (DVZ) n’est pas habilité à inscrire les enfants à l’état civil ni à y enregistrer leur identité et leur nationalité. Toutefois, on constate des pratiques différentes selon les communes. Dans une commune, un enfant peut être enregistré comme Palestinien, tandis que dans une autre, il peut être enregistré comme Belge.

De plus, la jurisprudence semble tout aussi incohérente. Certains juges rejettent les demandes d’apatridie de citoyens palestiniens adultes et les considèrent comme Palestiniens. Leurs enfants devraient donc également être considérés comme Palestiniens. D’autres juges reconnaissent l’apatridie des parents, ce qui signifie que, conformément à l’article 10 du Code de la nationalité, l’enfant né en Belgique a effectivement droit à la nationalité belge, puisque les enfants nés en Belgique ne peuvent jamais acquérir le statut d’apatride.

Les services fournis par les autorités au cours de la procédure judiciaire, proposés par le ministre de la Justice, le Collège des procureurs généraux, le Médiateur fédéral et la Myria de faire réexaminer le Code de la nationalité belge par les autorités compétentes, sont finalement exclusifs. Il en résulte une incohérence et une divergence d’interprétation de l’application et une absence d’uniformité de la jurisprudence.

Je n’ai pas compétence en matière de nationalité, mais je partage l’inquiétude qu’une application erronée de l’article de loi susmentionné puisse conduire à l’acquisition illicite de la nationalité belge. Il ne faut en aucun cas que cela devienne un moyen détourné et dissimulé d’obtenir un titre de séjour, car les conditions liées au regroupement familial avec un enfant belge mineur sont moins contraignantes.

De plus, ce problème ne se limite pas à la situation des enfants palestiniens. Le Service de l’immigration et de la naturalisation (DVZ) a recensé des cas similaires chez des enfants de parents originaires de certains pays d’Amérique latine et de Somalie.

Je peux vous fournir de nombreux exemples concrets pour illustrer ces abus. Ces exemples nécessitant des explications détaillées, je vous prie de bien vouloir me les demander par écrit.

Ma réplique : 

Merci, madame la ministre. Je me serais attendue à recevoir des éléments tangibles pour prouver les dimensions d’abus que vous soulignez. Or, vous ne faites que dire que votre administration dispose de données probantes d’abus sans jamais les donner, ici au Parlement, pour le justifier.

Franchement, cela montre à nouveau qu’il s’agit d’une politique purement idéologique. On parle quand même ici d’enfants, de bébés palestiniens, qui sont originaires d’un pays dans lequel il est par nature impossible de retourner, étant donné qu’il est impossible de retourner en Palestine, qu’il s’y déroule par ailleurs un génocide. Que vous faut-il donc de plus pour donner une protection et une possibilité de vivre dans la dignité à des bébés, nés ici, en Belgique, et de simplement respecter leurs droits?

Ici, vous inventez des abus plutôt que de vous concentrer sur des choses qui pourraient être efficaces et améliorer la situation en matière de migration. Vous inventez des abus qui n’en sont pas, pour retirer de façon complètement injuste des droits à des bébés.

C’est complètement affolant. Jusqu’où irez-vous? Ce sont des familles qui n’aspirent qu’à vivre en paix et à pouvoir élever leurs enfants loin des bombes, dans un pays dans lequel elles n’ont peut-être pas envie de vivre mais que la situation leur impose puisque dans leur pays, elles n’ont pas le droit de retourner. Je vous remercie de nous transmettre les chiffres et les données dont vous nous parlez, mais cette situation ne peut pas perdurer. Elle crée de l’insécurité juridique sur le terrain, elle crée des grandes difficultés pour des familles entières qui n’ont vraiment pas besoin de ça en ce moment.