Question orale déposée en juin 2025 mais posée au Ministre Beenders en commission le 22 octobre 2025. Lien vers le compte rendu complet de la Commission
Ma question :
Monsieur le ministre, j’espère que cela ne vous aura pas échappé, le 25 novembre – Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, arrive à grands pas.
À cet égard, je souhaite vous interroger sur l’état d’avancement du nouveau Plan d’Action National de lutte contre les violences basées sur le genre, conformément aux obligations qui nous incombent depuis que nous avons ratifié la Convention d’Istanbul.
- Où en est le processus d’évaluation du PAN 2021-2025? Comment est associée la plateforme de la société civile dans cette évaluation?
- Concernant le nouveau Plan, quel est le calendrier? Quelles étapes ont été franchies? Quelles sont les prochaines étapes? Comment allez-vous impliquer les associations?
Le 6 février 2025, une délégation du GREVIO, l’organe de suivi de la Convention d’Istanbul, s’est rendu en Belgique pour discuter de la mise en œuvre du plan et faire le point sur les recommandations issues des évaluations précédentes. Quelles recommandations du GREVIO allez-vous en particulier mettre en oeuvre?
- Aussi, vous aurez eu vent de la pétition et la campagne pour un « Pack Nouveau Départ » portée notamment par l’association Vie féminine. Elle propose un dispositif public de soutien à la reconstruction des victimes : aide financière d’urgence, accompagnement sociojuridique gratuit, vingt séances psychologiques, adresse protégée et protection spécifique au travail ou recherche d’emploi.
- Un accord avait été conclu en CIM Droits des Femmes en avril 2024, mais n’a pas encore été opérationnalisé, malgré le soutien public de plusieurs partis et ministres.
- Le Gouvernement entend-il intégrer le Pack Nouveau Départ dans le futur PAN ?
- Plus largement, pourriez-vous me dire quelles mesures concrètes visant à lutter contre les violences de genre ont été mises en œuvre depuis l’entrée en fonction de votre gouvernement ?
La réponse du ministre :
Madame Schlitz, l’évaluation du Plan d’action national 2021-2025 est en cours et sera achevée d’ici la fin de l’année. Le rapport comprendra deux parties: la première fera le point sur l’exécution des mesures, les principales réalisations, les difficultés observées et les perspectives à venir; la seconde proposera des recommandations pour le prochain Plan national d’action, notamment en vue de renforcer les échanges au sein du groupe interdépartemental et la collaboration avec la plateforme de la société civile. Une fois adoptée par le groupe interdépartemental, l’évaluation définitive sera présentée au Parlement fédéral et discutée avec la plateforme au cours d’une table ronde prévue au début 2026. En parallèle, la plateforme réalise sa propre évaluation du Plan national d’action. À partir de ces éléments, elle rédigera son rapport et proposera des recommandations.
S’agissant du prochain Plan d’action national, le groupe interdépartemental a récemment validé une méthodologie et un calendrier prévisionnel. Les travaux pour l’élaboration du prochain Plan d’action national débuteront au début de l’année prochaine. Ses priorités seront définies sur la base des résultats de l’évaluation définitive du Plan d’action national 2021-2025 et des recommandations de la plateforme nationale.
Le futur Plan d’action national tiendra également compte de la nouvelle directive européenne sur la lutte contre la violence à l’encontre des femmes, des recommandations du GREVIO, ainsi que d’autres observations internationales et nationales, notamment celles issues de la journée de consultation de la société civile organisée par l’Institut.
Par ailleurs, le groupe interdépartemental consultera la plateforme nationale lors de l’élaboration du nouveau Plan d’action national afin de recueillir son point de vue sur les priorités de celui-ci et leur mise en œuvre. Cette étape permettra de renforcer davantage l’implication de la société civile dans ce processus.
En parallèle des travaux relatifs à l’évaluation du plan, à la préparation du prochain plan et au suivi du GREVIO, j’ai pris plusieurs initiatives pour rebforcer la sécurité dans l’espace public. J’ai notamment rencontré les autorités locales pour discuter de l’aménagement des espaces publics et chargé l’Institut de mener une étude portant sur la législation relative au spray au poivre et d’organiser une table ronde sur les changements de mentalité nécessaires.
D’autres actions sont prévues en 2026 et seront présentées dans ma note de politique. En collaboration anec tous les acteurs concernés et les gouvernements compétents, j’examine les pistes possibles concernant le pack Nouveau départ et dans ce cadre, nous analysons les différentes formes que celui-ci pourrait prendre et la manière dont un tel paquet pourrait être intégré dans le Plan d’action national.
Par ailleurs, le premier rapport d’évaluation thématique du GREVIO n’a pas encore été publié et est toujours à l’étude. Comme je vous le disais, ces conclusions, dès leur parution, seront prises en considération dans l’élaboration du futur Plan d’action national. Dès que le rapport sera publié par le Conseil de l’Europe, il sera envoyé au Parlement fédéral.
Ma réplique :
Merci, monsieur le ministre, pour vos réponses.
En effet, c’est une bonne chose de pouvoir évaluer le travail qui a été mené sous la précédente législature pour pouvoir recenser les zones qui méritent une attention particulière. En outre, je me réjouis d’entendre que vous travaillez avec la société civile. Aujourd’hui, nous dénombrons déjà 19 féminicides, ce qui montre clairement que les violences envers les femmes ne sont pas un phénomène en recrudescence. Elles ont même tendance à se transformer, sous forme de violences en ligne et de nouveaux moyens d’exercer la domination envers les femmes et les minorités de genre par le biais de l’Internet.
J’attire également votre attention sur le fait que pour pouvoir avoir de l’ambition, il faut des budgets. Certes, votre gouvernement s’est lancé dans des exercices budgétaires de forte réduction des dépenses, mais investir dans la lutte contre les violences est un argument percutant pour vos collègues. Une femme qui n’est pas victime de violences est une femme qui va bien, qui peut travailler et qui est pleinement capable de mener sa vie et d’élever ses enfants. Il en va de même pour la question de l’accès aux ressources financières en tant que femme: en effet, une femme qui est autonome financièrement est une femme qui peut s’extraire des violences et des rapports de domination.
Dès lors, j’attire vraiment votre attention sur les violences économiques qui subsistent aujourd’hui dans notre pays. Je crains d’ailleurs que certaines réformes socio-économiques menées actuellement appauvrissent les femmes et les placent dans des positions de dépendance extrême. Je pense notamment à la limitation des allocations de chômage dans le temps pour les femmes qui ont aujourd’hui le statut de cohabitant et qui n’auront plus aucun revenu propre. Elles deviendront totalement dépendantes de leur conjoint cohabitant, ce qui les place dans des situations de vulnérabilité terrible. Chacun sait que l’argent est le nerf de la guerre, et il en va de même au sein des couples. C’est donc souvent de la situation économique que naissent d’autres formes de violences. Lorsque la femme perçoit des ressources financières suffisantes, les autres formes de violence ne se développent pas, du moins pas aussi vite et pas aussi fort. J’attire donc votre attention sur la nécessité de défendre des budgets à la hauteur des ambitions.

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