Question parlementaire au ministre Clarinval sur les directives européennes sur la transparence des salaires. Lien vers le compte rendu complet de la Comission. 

Ma question : 

Monsieur le ministre, ma question vise à vous demander où vous en êtes dans la transposition de la directive relative à la transparence des salaires, qui constitue, en réalité, un levier essentiel pour l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Vous avez jusqu’au 7 juin 2026 pour transposer cette directive dans le droit national. J’aimerais donc savoir où en est le travail, et à quel moment un projet de loi pourrait arriver sur la table.

Par ailleurs, étant donné qu’il me reste un peu de temps, j’aimerais rappeler à M. Ronse que les inégalités salariales entre les hommes et les femmes ne font rire personne et certainement pas les femmes. Si les employeurs rémunéraient de manière équitable, et offraient des temps de travail identiques aux hommes et aux femmes, nous n’aurions pas à produire tout ce travail de paperasserie au niveau européen, ni à procéder ensuite à sa transposition au niveau national.

Si la transparence salariale était d’office de mise, et si les employeurs transmettaient automatiquement — ou à la demande — les salaires pratiqués dans l’entreprise, avec tous les avantages qui les accompagnent, il ne serait pas nécessaire de mettre en place des directives et des transpositions.

Ne vous trompez pas de combat, monsieur Ronse : l’écart salarial a pour conséquence que des femmes ne sont pas rémunérées correctement pour le travail qu’elles fournissent, et que si elles étaient des hommes, elles seraient mieux rémunérées, ce qui est profondément injuste.
J’imagine que vous partagez ce constat.

Par ailleurs, c’est aussi un manque à gagner pour la sécurité sociale. Car si les femmes gagnaient autant que les hommes pour le travail qu’elles exercent, elles disposeraient automatiquement de davantage de pouvoir d’achat, ce qui leur permettrait de consommer, de faire tourner l’économie, mais aussi de contribuer davantage aux cotisations sociales, aux pensions, aux soins de santé, etc.

Nous avons tous à gagner à tendre vers plus d’égalité. Si la Belgique est exemplaire, cela ne signifie pas que l’écart salarial a disparu. Il faut continuer à tirer le meilleur élève en la matière.

La réponse du ministre :

Monsieur le président, la directive européenne relative à la transparence salariale vise à renforcer le principe « à travail égal, salaire égal » et à s’attaquer, au moyen de mesures très concrètes, au manque d’informations et de transparence sur les rémunérations, qui constituent l’une des principales causes de l’écart salarial et de la discrimination salariale.
Cette directive doit être transposée en droit belge d’ici le 7 juin 2026.

La directive européenne relative à la transparence salariale est claire dans son objectif de réduire les différences de rémunération entre les femmes et les hommes, mais sa transposition dans la pratique s’avère particulièrement complexe.

Le principe d’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale n’est pas nouveau en Belgique, mais il est vrai que la directive prévoit des dispositions et des mesures en matière de transparence, tant au niveau individuel que collectif, allant plus loin que ce qui est actuellement prévu dans le droit belge. La transposition de cette directive en droit belge constitue donc une tâche lourde et complexe.

Dans ce cadre, des recherches de la SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, ainsi que de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, ont été récemment menées. Depuis la fin de 2022, ces deux institutions mettent à disposition des entreprises des lignes directrices sur la possibilité d’obtenir des informations relatives aux rémunérations dans le cadre de la base de données administrative.

Actuellement, les partenaires sociaux débattent de cette question au Conseil national du travail, notamment en première instance, pour le niveau sectoriel. Les partenaires sociaux y échangent des expériences et des connaissances dans le but d’assurer une meilleure transparence salariale, dans le respect de la législation en vigueur et de la protection des données.

Je suis également convaincu que les connaissances et les expériences des différents partenaires sociaux en matière de transparence salariale et d’écart salarial seront d’une grande utilité pour l’élaboration des mesures nécessaires à la transposition de cette directive.

En ce qui concerne le calendrier, la Belgique doit, comme je l’ai indiqué, transposer la directive au plus tard le 7 juin 2026. Mon administration, en concertation avec mes collègues compétents en la matière, et en particulier avec Mme la ministre Khadija Zamouri, travaille activement à l’élaboration d’un projet de loi.

Une attention particulière est portée à l’impact administratif que ces nouvelles obligations pourraient avoir sur les entreprises. En effet, il convient de veiller à limiter la charge administrative autant que possible, tout en assurant une mise en œuvre efficace et conforme aux objectifs de la directive.

Ma réponse : 

Monsieur le ministre, merci pour vos réponses. J’entends qu’un travail est en cours… Il n’y a quand même pas encore beaucoup d’éléments concrets par rapport à la transposition. Je vous invite à avancer afin d’éviter que nous soyons, encore une fois, à vous retrouver parmi les moins bons élèves de la classe européenne en étant les derniers à transposer cette directive. Je ne parle pas à transposer dans les délais requis, donc de ne pas la transposer des atterrirés.

D’autre part, monsieur Ronse, croyez-vous que cela nous fait rire ? Croyez-vous que les femmes se réjouissent de gagner moins d’argent que leurs collègues ou d’avoir moins d’avantages que leurs collègues ? Cela ne fait rire personne.

À un moment, il y a deux options. Soit les employeurs se responsabilisent tout seuls, mais jusqu’ici, cela n’a pas été fait. Soit les employeurs, les femmes et les associations de femmes nous organisons pour faire voter des directives comme celle-là.

Vous pouvez le répéter, vous devez aller au niveau européen. Les ministres aussi d’ailleurs peuvent y aller. Il n’y a pas de souci. C’est une invitation. Il ne faut pas inverser les rôles.

David Clarinval, ministre : (…)

Sarah Schlitz (Ecolo-Groen) : Tout à fait. Je sais que la Belgique est un des meilleurs de l’Europe. Cela ne veut pas dire que nous sommes parfaits. Et surtout, nous allons démarrer de pas, ne pas nous retrouver dans le dernier tiers.

D’autre part, il y a deux options. Comme je le disais, soit les entreprises se responsabilisent tout seules – et manifestement elles ne se sont pas montrées exemplaires – soit, nous faisons en sorte qu’elles le soient. Il n’y a même pas besoin de “forcer” puisque cela consiste simplement à réclamer des éléments objectifs : combien les femmes gagnent-elles dans votre entreprise, et comment cela se fait-il ? Ce sont des chiffres objectifs, des éléments concrets. C’est de cela qu’il s’agit dans cette directive !

Ou alors, vous pouvez mettre en place, en tant qu’État, les conditions pour davantage d’égalité, à savoir des congés de paternité et de maternité égaux, des places en crèche, le fait de lutter contre les discriminations envers les femmes sur le marché du travail. Vous pouvez mettre toutes ces politiques en place pour faire en sorte que ce ne soient pas les entreprises qui doivent se soumettre à ces obligations. Des alternatives, il en existe, mais je ne vois pas votre gouvernement y travailler en ce moment. Je pense donc que les propos que vous tenez ici sont assez malvenus, monsieur Ronse.