Monsieur le Ministre,

La semaine dernière, Europol a sorti son rapport annuel sur l’état du terrorisme dans l’Union européenne. Un élément a attiré mon attention : Europol pointe le lien entre des idéologies d’extrême droite et des théories misogynes et antiféministes. Si tous les extrémistes de droite ne sont pas antiféministes, ces idéologies “sont unies dans le rejet de la diversité et du droit des minorités”, d’après Europol, et portent “une vision inégalitaire par nature” de la société, d’après Benjamin Biard, chercheur au CRISP. L’antiféminisme extrémiste s’insère par exemple dans les “théories du grand remplacement”. “Le féminisme aurait été inventé pour distraire les femmes de leur rôle ‘naturel’ de mères, et est par conséquent blâmé pour la chute des taux de natalités dans les pays de l’Europe occidentale, ce qui a finalement permis l’immigration”, souligne le rapport d’Europol.

Une autre mouvance pouvant être proche de ces théories est celle des “incels”, les “célibataires involontaires”, qui se considèrent comme étant injustement rejetés par la gent féminine. Des femmes à qui on aurait donné un peu trop de droits et qui auraient perdu de vue leur “rôle premier”. La figure emblématique de ce mouvement est Elliot Rodgers qui a tué six personnes en Californie avant de se donner la mort à l’âge de 22 ans.

Monsieur le Ministre,

Avez-vous des informations sur l’ampleur de ces mouvements dans notre pays ?

Les services de police sont-ils informés et sensibilisés sur le danger que peuvent constituer de tels mouvements et idéologies ?

La sûreté de l’Etat effectue-t-elle un travail spécifique vis-à-vis de ces groupes?

Je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour vos réponses à mes questions.

 

Réponse du Ministre De Crem (Commission Intérieur du 14/07/2020) :

Les idées relatives aux célibataires involontaires (Incels) et l’entrelacement de cette misogynie ou idéologie antiféministe avec l’extrémisme de droite en ligne sont connues des acteurs de la chaîne de sécurité.

En ce qui concerne les Incels (célibataires involontaires), l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace (OCAM) n’a actuellement aucune indication selon laquelle une menace terroriste extrémiste concrète émanerait de cette idéologie en Belgique.

L’OCAM suit en permanence la situation et la menace provenant de la mouvance d’extrémisme de droite ou de gauche. Dans le but de se faire une meilleure idée du phénomène, l’OCAM travaille sur plusieurs analyses visant à sensibiliser les services de police ainsi que les autres services. Le phénomène des Incels et, de manière plus générale, le rôle du genre dans les idéologies d’extrémisme – de gauche comme de droite – font partie de ces analyses.

Au sein de la police, les unités de terrain ont été sensibilisées par la direction centrale de la lutte contre la criminalité grave et organisée (DJSOC) et Terro, le service central du terrorisme de la police judiciaire fédérale. Ce service assure – comme pour les autres idéologies, telles que le terrorisme et l’extrémisme violent – un suivi actif au niveau de la police et, en sa qualité de partenaire du plan R, de la structure multidisciplinaire de la lutte contre le radicalisme et le terrorisme.

Enfin, votre dernière question ne relève pas de mes compétences mais de celles de mon collègue, le ministre de la Justice.

 

Ma réplique :

Merci pour votre réponse, monsieur le ministre. J’interrogerai également le ministre de la Justice sur ce sujet, qui émerge dans notre pays et qu’il va, dès lors, falloir suivre de près. Je ne manquerai pas de revenir vous interroger dans les mois à venir.